Peut-on voir dans les échecs scolaires le reflet d’une faible estime de soi ? Spontanément, la plupart des gens répondront par l’affirmative à cette question. Les recherches en éducation apportent néanmoins une réponse plus mitigée tant l’estime de soi apparaît comme une notion complexe. Certes, un élève ayant une très faible estime de lui-même risque fort de ne pas trouver l’énergie pour s’engager dans son travail scolaire. Cependant, la plupart des élèves, même ceux en difficultés d’apprentissage, ont une estime d’eux-mêmes relativement positive, de sorte qu’il est difficile d’expliquer un grand nombre d’échecs par une faible estime de soi. Les chercheurs se sont donc intéressés à un élément plus spécifique – et plus flexible – pour expliquer les résultats scolaires des élèves : la confiance en ses capacités d’apprentissage.
Quand la confiance invite à la performance
Sous des appellations variées, la plupart des conceptions actuelles de la motivation partagent l’idée selon laquelle la confiance en nos capacités à agir efficacement joue un rôle crucial dans notre engagement et nos performances. Mais surtout, les recherches indiquent que cette confiance peut varier d’un domaine à l’autre, ainsi que d’une matière scolaire à l’autre (1). Tout comme je peux me sentir très à l’aise avec des instruments de musique mais maladroit sur un terrain de basket, je peux me sentir très compétent en français mais peu brillant en mathématiques. Et ceci n’est pas sans conséquences. Ainsi, les élèves qui ont confiance en leurs capacités dans une matière choisissent de préférence des activités présentant pour eux un défi et leur donnant l’occasion de développer leurs habiletés (plutôt que de s’engager dans des tâches faciles qu’ils sont assurés de réussir). En général, ils se fixent des objectifs d’apprentissage plus élevés, cherchent davantage à comprendre en profondeur et à donner du sens à ce qu’ils étudient, gèrent mieux leur temps de travail, se laissent moins distraire de leurs objectifs et persévèrent plus face à des difficultés. Ils dominent également mieux stress et anxiété, et aboutissent finalement souvent à de meilleures performances. Inversement, les élèves ont tendance à se désintéresser des activités dans lesquelles ils se sentent peu efficaces, ce qui peut avoir des répercussions sur leurs choix d’études. Cette manière de faire leur permet de conserver une bonne estime d’eux-mêmes, mais peut conduire certains jeunes à se désinvestir de leur scolarité, avec les conséquences négatives que cela peut avoir pour leur avenir.
Soulignons que les conséquences positives d’une bonne confiance en soi ne se vérifient pas dans tous les cas. Il faut que le résultat à atteindre dépende au moins en partie de l’action de l’élève. Dans un environnement où le résultat est distribué « à la tête du client » ou sur une base discriminatoire, la confiance en ses capacités ne joue plus un grand rôle. Il en est de même dans un environnement non stimulant, où l’élève est certain d’obtenir un bon résultat en ne faisant quasiment rien. Enfin, même avec une confiance en soi élevée, un apprenant peut décider de ne pas s’investir dans une tâche qu’il estime sans intérêt, inutile ou absurde. Motivation et apprentissage sont des phénomènes dépendant de multiples facteurs et la confiance en ses capacités n’est bien entendu pas le seul en jeu.