L’économiste Kako Nubukpo, qui a été ministre au Togo, mène depuis des années un combat pour l’abandon du franc CFA et son remplacement par une monnaie interafricaine. Néanmoins, à observer certaines situations nationales, son beau projet aurait du mal à tenir la route et il en est de même pour d’autres propositions portées par ce livre. Reste que la sincérité du propos frappe le lecteur qui se laissera emporter par l’enthousiasme de l’auteur lorsqu’il évoque des « communs au cœur d’une dynamique du développement », des innovations sociales spontanées venues du bas telles que les ressources éducatives libres en ligne, des circuits courts contre la « révolution verte » (qui accroît la dépendance agricole vis-à-vis des marchés mondiaux) ou la mise en place de services publics de première nécessité. De plus, les propositions de K. Nubukpo sont toujours argumentées et précisément chiffrées. La protection des ressources naturelles, y compris de la terre, l’indépendance alimentaire, l’agroécologie, ainsi que la souveraineté financière et numérique sont d’ailleurs des mesures non seulement raisonnables mais nécessaires, et un peu plus audacieux, on aimerait une économie du partage que l’auteur dit « ancrée dans la réalité sociale africaine ».
On regrettera donc qu’à moins de mesures politiques radicales, ce qui apparaît comme un vaste projet a peu de chance de s’imposer alors que l’Afrique subsaharienne doit accueillir un milliard d’individus supplémentaires en une génération dans un contexte de faible productivité, de quasi-absence d’industrie, d’urbanisation accélérée, le tout coiffé par une crise climatique devenue permanente.