Une justice au quotidien

L'augmentation du nombre de litiges a entraîné une spécialisation des tribunaux et des avocats. Les efforts pour rapprocher la justice du justiciable se traduisent par la multiplication des instances de conciliation.

Les « affaires » et les grands procès (procès Papon, procès du sang contaminé...) tiennent une place de plus en plus importante dans l'actualité judiciaire française. En fait, il ne s'agit que de la partie émergée de l'iceberg. Le recours aux tribunaux administratifs, civils, commerciaux, aux instances précontentieuses et aux conseils de prud'hommes a considérablement augmenté dans les vingt dernières années. Les instances parajudiciaires se sont multipliées et le nombre des affaires traitées a en moyenne doublé. Pour les seuls conseils de prud'hommes, le volume d'affaires traitées dépasse les 200 000 (166 000 instances de fond- et 50 000 référés- en 1997). Pour répondre à l'inflation des litiges commerciaux et des infractions au droit social, les tribunaux de commerce et les conseils de prud'hommes se sont développés.

Le recours aux tribunaux a considérablement augmenté dans les vingt dernières années

Ces évolutions entraînent des conséquences qui les renforcent par un effet de retour. Tout d'abord, le droit s'est diversifié et spécialisé. Il en est résulté la création de commissions pré-contentieuses et la spécialisation des tribunaux et des professions juridiques. Les chambres spécialisées dans le contentieux matrimonial ont été les premières concernées par cette évolution ; leur domaine de compétences a été élargi aux affaires familiales en général. D'autres ont suivi, si bien qu'il existe des tribunaux spécialisés avec des juges spécialistes d'un domaine et des avocats-experts correspondants. Dans les tribunaux pour enfants, par exemple, les juges s'entourent désormais de psychologues et d'éducateurs dont ils attendent les avis. Ajoutons, dans le domaine du droit administratif, la création des tribunaux administratifs, qui revient à transformer le Conseil d'Etat en un équivalent de la Cour de cassation.

Cette tendance à la spécialisation concerne aussi les avocats, qui se sont vus reconnaître le droit d'afficher une spécialité, ce qui entérinait leur spécialisation de fait 1.

L'augmentation du nombre des litiges a eu d'autres conséquences. Elle a notamment conduit à remettre en question le principe de la collégialité du tribunal. La pratique du juge unique s'est répandue, ainsi que celle du juge rapporteur, qui respecte, en principe, la collégialité. Mais, en fait, un seul juge connaît le dossier.

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Les maisons de justice contribuent à créer un droit enraciné dans la société

Pour désencombrer les tribunaux et tenter de rapprocher la justice du justiciable, une réflexion s'est développée en vue d'une « justice de proximité sous forme du développement des fonctions de conciliateurs et de médiateurs » (annexe à la loi de janvier 1995). C'est ainsi que les maisons de justice ont été créées. Instances de médiation, elles visent à traiter des affaires pénales dans un contexte local, en d'autres termes, à régler à l'amiable toutes sortes de différends (conflits de voisinage, litiges familiaux...) par l'intermédiaire d'une tierce personne investie de la mission de médiation.