En France, le vieillissement démographique est spontanément perçu comme un « problème » de société qui appellerait forcément l'avis des experts. Qui dit vieillissement dit en effet problème de financement du système de retraite, voire dépendance...
Pourtant, ce vieillissement démographique est aussi le résultat d'un allongement de l'espérance de vie et donc une bonne nouvelle. Aujourd'hui, un Français qui atteint l'âge de 60 ans a encore vingt ans à vivre, une Française vingt-cinq. En moyenne, une personne de 60 ans a ainsi trois chances sur quatre d'atteindre 80 ans contre seulement une sur quatre au début du xxe siècle. Et celles qui les atteignent ont encore une espérance de vie de huit ans ; seule la moitié d'entre elles pâtiront d'incapacité fonctionnelle, et encore celle-ci pourra n'être que légère. Faut-il également rappeler que cet allongement de l'espérance de vie s'accompagne de surcroît de nouvelles solidarités intergénérationnelles ?
Ces réalités ne sauraient certes faire oublier les problèmes posés par l'arrivée des générations du baby-boom à l'âge de la retraite. Mais comment expliquer cette perception alarmiste dominante du vieillissement dans une société comme la nôtre, dont une nouvelle illustration a été fournie, l'an passé, par les débats autour de la réforme du système de retraite ? Et peut-on laisser ces débats aux mains des seuls experts ?
Ces questions ont été très largement débattues au cours d'un colloque qui s'était tenu quelques années plus tôt, sur le thème de l'expertise et du débat public dans le cadre d'un dispositif original : un atelier consistant à confronter les analyses d'experts avec les points de vue de « non-experts » dont un cinéaste 1.
Ainsi que l'a résumé l'un des participants, la réponse à cet apparent paradoxe (des évolutions positives, une vision alarmiste) est à chercher dans le « monopole » exercé de fait par certaines catégories d'experts dans les débats de société autour du vieillissement et ses conséquences : les démographes, les économistes et surtout les gériatres.