Un enfant de 4 ans rit chaque jour autant qu’un quadragénaire en deux mois et demi ! C’est ce que montrent deux chercheures de l’université de Stanford, qui ont établi une courbe du rire selon l’âge. Leur enquête porte sur 1,4 million de personnes dans plus de 160 pays du monde. Le constat est sans appel : la fréquence des rires (en moyenne 300 fois par jour à 4 ans) chute à 23 ans et ne remonte qu’aux alentours de 70 ans. Dans leur ouvrage Humour, Seriously, qui résume leurs cinq années de recherche, Jennifer Aaker et Naomi Bagdonas proposent plusieurs explications à ce phénomène. Tout d’abord, en grandissant s’impose l’idée que certains individus sont drôles, d’autres non. Il s’agirait d’une qualité ou d’un trait de personnalité sur lequel on ne peut rien : c’est le mythe du « born with it », ce qui peut être inhibant. Ensuite, les adultes craindraient le ridicule d’une blague qui tombe à plat : c’est la peur du flop. Par ailleurs, les chercheures suggèrent que la traversée du désert du rire correspond à la vie professionnelle : la plupart des répondants estiment que le rire n’a pas sa place au travail. Il faudrait « rester sérieux » pour être plus efficace, ne pas se distraire et donner l’air « professionnel ». Pourtant, les chercheures expliquent que rire stimule la créativité, augmente notre capacité de résilience et notre résistance au stress, ce qui est loin d’être inutile à l’âge adulte et dans le monde du travail…
Jennifer Aaker et Naomi Bagdonas, Humour, Seriously, Penguin Books, 2020 .