Depuis la fin du XIXe siècle, les colloques représentent un aspect essentiel de la vie scientifique. Leur histoire est celle d'un prodigieux succès : leur nombre est toujours croissant, leurs formes et l'étendue de leurs publics également. Ce genre de rencontre s'accompagne souvent d'une masse importante d'écrits et d'imprimés - textes et résumés des communications, actes, publications séparées, etc. Mais les colloques sont avant tout des mondes de paroles, ce que traduisent bien certains des noms qu'ils portent : colloques, entretiens, conférences. Par ailleurs, 50 % d'entre eux ne donnent pas lieu à publication. Leur déroulement témoigne de leur nature profondément orale, même si des textes sont distribués et des images montrées.
Un schéma s'est fixé très tôt, qui admet bien des variantes dictées notamment par la taille et la plus ou moins grande solennité de la manifestation : un discours d'ouverture présentant le programme scientifique de la rencontre, des communications en séances, un discours de clôture tirant les conclusions. Dans les grands colloques internationaux, les séances plénières rassemblant tous les congressistes offrent d'autres occasions de parole : des conférences prononcées par des savants distingués, des rapports sur le travail fait en sections. Les communications, d'une durée variable - de 10 à 30 minutes - suivant les disciplines mais aussi les usages nationaux, sont théoriquement suivies, chacune ou par blocs homogènes, d'une discussion.
Sous le nom générique de colloque, on trouve une large gamme de réunions. Elles sont parfois désignées par des termes spécifiques référant à leur durée - par exemple journée ou semaine d'étude - ou à leur propos - un symposium est une sorte de « minicolloque » spécialisé au sein d'une réunion plus vaste. Ces termes, qui ne sont pas toujours utilisés avec la pertinence souhaitée, attestent principalement la floraison du genre. Il est ainsi des colloques internationaux, nationaux, régionaux et locaux. Certains sont périodiques, notamment ceux qui sont organisés par des sociétés savantes ou des associations professionnelles. Ils peuvent être généralistes et couvrir un champ disciplinaire mais, le plus souvent, ils sont spécialisés, voire très spécialisés. Leur durée est variable : d'une journée à une semaine. Leur taille n'est pas plus uniforme : certains ne réunissent qu'une poignée d'orateurs et un public limité, d'autres rassemblent plusieurs centaines, si ce n'est des milliers de participants.
L'oralité, quelle résistance !
Le développement de cette forme orale de communication qu'est le colloque intervint alors que l'imprimé - le livre mais plus encore le périodique - triomphait. Entre 1858 et 1898, c'est-à-dire dans les années de fondation des colloques scientifiques internationaux, la production imprimée doubla dans le monde ; cette augmentation concerna principalement les périodiques qui quadruplèrent entre 1866 et 1898. Dans les années 1950-1970, alors que ces mêmes colloques connaissaient une croissance exponentielle - leur nombre double tous les sept ans -, la production imprimée explosait ; un seul chiffre suffira : chaque année, plus d'un million d'articles étaient publiés. Cette croissance vertigineuse se poursuivit et, à la hauteur des années 90, on comptait 40 000 périodiques scientifiques, soit 25 millions d'articles 1.