Un verre de vin à chaque repas serait-il bon pour la santé ? Cette recommandation souvent entendue a été suivie avec un peu trop de zèle au 19e siècle. Les hôpitaux étaient alors peuplés de malades qui souffraient d’un alcoolisme dit « thérapeutique », intoxiqués par une consommation excessive d’alcools auxquels on prêtait des vertus médicales. En effet, il n’était pas rare de se voir prescrire des médicaments à base d’alcool, en prévention, et même pour guérir de certaines maladies ! Un certain docteur Boucharat écrivait que ces boissons « sont rapidement brûlées en produisant de la chaleur et de la force ». Le docteur Joffroy, qui parlait d’une « véritable révolution thérapeutique » leur prêtait une action bénéfique sur le système nerveux, le cœur, l’intelligence, et même contre la pneumonie ou le typhus. Ils étaient intégrés à de nombreuses préparations sous l’appellation « boissons hygiéniques », à une époque où l’hygiénisme dictait nombre de pratiques sanitaires. On pouvait acheter des apéritifs, du vin de Bugeaud ou de Seguin promus par un discours commercial teinté d’arguments pseudo scientifiques, avec la complicité de pharmaciens qui s’alliaient à l’industrie.Vin de quinquina ou absinthe faisaient partie des produits les plus reconnus pour leurs supposés bienfaits pour la santé. Ce fut évidemment le contraire, et ce phénomène devint un enjeu de santé publique. Approchant la fin du siècle, les voix des médecins et du mouvement anti-alcoolique se sont multipliées pour dénoncer ces dérives, avec notamment la publication d’un rapport au titre sans ambiguïté : « Alcool. Maladie. Mort ».