Ce soir de juin, Benoît Coquard, 38 ans, longue silhouette sombre, sort d’un plateau télé d’Arte. Arrivé le matin même de Dijon, où il réside, le sociologue a enchaîné les interviews. Le lendemain, avant de participer à un colloque, il sera l’invité des matinales de France Culture et RMC. Quelques jours avant notre rencontre, le scrutin européen a placé le Rassemblement national (RN) en tête dans 93 % des communes françaises, essentiellement rurales. Et le travail de Benoît Coquard sur la jeunesse rurale, Ceux qui restent. Faire sa vie dans les campagnes en déclin (La Découverte, 2019) en fait un analyste éclairant. Peut-être parce qu’il enquête « en immersion », inspiré par la « participation directe » de Marcel Maget, pionnier de l’ethnologie des années 1940 à l’origine d’enquêtes dans les communautés rurales, et par les travaux de Nicolas Renahy (Les Gars du coin, La Découverte, 2005), devenu depuis son collègue à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae). Benoît Coquard, qui se voit comme un « traducteur », s’intéresse à la manière dont les gens vivent, aux « gestes minuscules ». C’est, dit-il, « ce qui permet de comprendre le vote ». Sans surplomb.