Bernard Mandeville (1670-1733) Les vices individuels font la vertu collective

Dans une fable publiée en 1705, Bernard Mandeville met en scène une ruche qui se met à dépérir à mesure que les abeilles qui la peuplent deviennent vertueuses.

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Le médecin et philosophe d’origine néerlandaise Bernard Mandeville est principalement connu pour une satire qui fit scandale. S’inspirant des Fables de Jean de La Fontaine (1621-1695) qu’il traduisit en anglais durant sa jeunesse, il écrit en 1705 La Ruche mécontente ou les fripons devenus honnêtes gens qui paraîtra dans une version augmentée en 1714 sous le nom de La Fable des Abeilles : ou vices privés, vertus publiques.

B. Mandeville y dépeint une ruche où certaines abeilles, rongées par la culpabilité de mener une vie dissolue, décident d’observer une conduite vertueuse. Ce faisant, elles se rendent compte rapidement que leur nouveau comportement a pour conséquence non pas de faire prospérer leur communauté, mais au contraire de la ruiner. Par exemple, subtiliser ou extorquer de l’argent évitait jusqu’alors à celui-ci d’être épargné par son propriétaire, et la somme venait « à circuler dans le commerce [si bien] que la nation gagn[ait] à ce vol », explique B. Mandeville. La « morale » de ce poème, où la ruche n’est autre qu’une allégorie de l’Angleterre, peut être résumée ainsi : la prospérité et le bonheur collectifs découlent de vices individuels. C’est en étant pervers, corrompus, dépravés, perfides et méchants que les citoyens rendent service à la société – pas en se comportant de manière honnête.