« Jamais je n’aurais pensé être un jour victime d’une manipulation commerciale si immorale et déloyale, moi qui suis du genre à me méfier des commerciaux et de leurs stratégies de vente. Quand je repense, huit mois plus tard, à ce qui nous est arrivé sur ce salon, j’ai la gorge serrée. Je suis partagée entre un sentiment de honte, de colère et de profonde tristesse. » Marie et son conjoint ont été victimes de ce que l’on qualifie, dans le jargon juridique, d’une « vente abusive et agressive » (une vente de fenêtres d’une valeur de 21 000 euros contractée sur un salon où ils s’étaient initialement rendus seulement pour se renseigner). Cette pratique regroupe un ensemble de techniques manipulatoires dont le but est de vendre un produit au client (ou de lui faire signer un devis), en brouillant son esprit critique et en déclenchant chez lui certains automatismes. Cette manipulation commerciale se distingue de « l’argumentation » commerciale qui vise, de manière tout à fait légitime, à mettre en valeur les atouts d’un produit auprès du client. Alors comment éviter, un beau jour, d’acheter un bateau à moteur de 2 x 370 CV à 230 000 euros alors que vous vivez en plein Paris ?
Des techniques efficaces et rodées
La majorité des pratiques commerciales s’ancrent sur les connaissances en psychologie sociale, et notamment sur la théorie de l’engagement – ou théorie de la manipulation – présentée par le psychologue américain Charles Kiesler en 1971. L’idée est qu’il est possible, en recourant à des facteurs externes, d’accroître significativement le taux d’engagement humain et moral d’un individu. Tout le monde a par exemple entendu parler de cette technique d’amorçage dite du « pied-dans-la-porte » qui consiste à vous adresser une formule de politesse classique vous plongeant d’office dans une relation de réciprocité. Parmi les facteurs fréquemment utilisés pour renforcer l’engagement prime le sentiment de liberté. Plus un individu se sent libre de son comportement et de ses choix, plus facilement il s’engage. Aussi, les phrases clés telles que « Vous êtes libre d’accepter ou non… » sont monnaie courante dans les discours commerciaux.