« L es lois sont toujours utiles à ceux qui possèdent et nuisibles à ceux qui n’ont rien » : cet aphorisme de Jean-Jacques Rousseau, cité par Smaïn Laacher, ne manque pas d’à-propos dans ce livre. Ceux qui « n’ont rien », pas même un État, sont les demandeurs d’asile déboutés par l’Ofpra qui se tournent vers la Cour nationale du droit d’asile pour tenter d’obtenir, en dernière instance, le statut de réfugié. Quatorze ans durant, le sociologue, spécialiste des migrations, y a siégé comme juge assesseur.
Face aux juges, les requérants n’ont que le récit de leurs malheurs pour attester qu’ils sont en danger dans leur pays d’origine. Souvent traumatisés par ces persécutions, les exilés sont aussi éprouvés par la route elle-même. « Ce voyage m’a fait prendre dix ans d’âge », dit l’un d’entre eux, rappelant la présence constante de la mort sur le trajet. Pour les femmes, ce sont les viols et l’esclavage sexuel. Autant d’épreuves qui compliquent le récit de soi.