« Le XIXe siècle est celui de l’histoire », déclare l’historien Gabriel Monod en 1876. Le xixe siècle a vu l’histoire devenir une discipline phare, imprégnant la société, la politique et l’art. C’est le temps des grandes fresques littéraires, des sculptures héroïques et des peintures nationales. Mais si l’histoire moderne est née dans cette première moitié du xixe siècle, c’est grâce à la Révolution française. Auparavant, le passé était la seule valeur digne de légitimité. La coutume et la tradition dominaient les mentalités. Mais la Révolution, en créant une rupture radicale avec l’Ancien Régime et la royauté, a bouleversé le sens de l’histoire. Désormais, ce n’est plus la tradition qui importe, mais le futur marqué par la notion de progrès. Chateaubriand résume ainsi ce nouvel état d’esprit : « Les sociétés anciennes périssent ; de leurs ruines sortent des sociétés nouvelles : lois, mœurs, usages, coutumes, opinions, principes même, tout est changé. » Mais l’histoire, en prenant de l’ampleur, a aussi transformé la méthode historique. Les historiens, tels Augustin Thierry (1795-1856) et Jules Michelet (1798-1874), ne se privent plus d’utiliser la littérature et la philosophie. De cette manière, ils souhaitent écrire une « histoire totale ». Celle-ci aurait pour objectif de donner de la cohérence à une histoire de France, scandée par les bouleversements politiques. L’historien se fait ainsi prophète, artisan de l’histoire et de la conscience nationale. Michelet est la figure-clé de cette nouvelle histoire. Pour lui, l’heure est venue d’ériger l’histoire en science et de s’appuyer sur des documents originaux pour l’interpréter. Élu en 1830 à la tête de la section historique des Archives, il utilise ces dernières dans son œuvre monumentale, Histoire de France .
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Cinq siècles de pensée française
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