Sciences Humaines : Vos travaux portent sur l'histoire de la paléontologie animale et humaine. Mais, plutôt que traiter d'un moment de la discipline, ou d'une théorie en particulier, vous avez retracé l'histoire de certains de ses objets remarquables : le mammouth, l'homme dans ses premières étapes. Pourquoi ce choix ?
Claudine Cohen : L'histoire des sciences, et en particulier celle de la paléontologie, a le plus souvent été envisagée comme une histoire de héros, de découvertes, ou bien encore comme celle du développement des idées, des problèmes et des méthodes. Se centrer sur des objets de science est une autre façon d'explorer cette histoire, qui permet de mettre en lumière aussi bien les idées que les circonstances qui les ont vu naître. Les sciences de la vie étudient des objets distincts, reconnaissables, les espèces biologiques. Il m'a semblé que, en faisant l'histoire de certains objets canoniques de la paléontologie, on pouvait ouvrir un angle neuf, et jeter un regard inédit sur le développement de ces disciplines. L'objet fossile est une sorte de repère stable pour suivre et mesurer le changement des méthodes, des théories, des débats et des controverses.