Dr Kawa & Mr Shima

Le concepteur du programme d’entraînement cérébral, Ryuta Kawashima, est un personnage difficile à cerner. Côté pile, c’est un passionné et un bourreau de travail.
Il appartient au sérail universitaire : médecin de formation, enseignant à l’université de Tohoku, fondateur de deux instituts de recherches, c’est un neuroscientifique de haute volée qui a mené de nombreuses études rigoureuses sur la cognition et l’émotion humaines. Grand seigneur, il a refusé d’empocher les 22 millions de dollars (15 millions d’euros) de droits d’auteur proposés par Nintendo, préférant en reverser une partie à l’université. Son salaire mensuel de 5 900 euros lui suffit, et si sa famille veut s’enrichir, elle n’a qu’à travailler, déclare-t-il… Il n’envisage pas une seconde de se retirer fortune faite puisque, de son propre aveu, il ne saurait pas comment s’occuper sur une île ensoleillée. Actuellement, il aide Toyota à concevoir un véhicule destiné à limiter les risques d’accident chez les seniors. Côté face, les études dont il se prévaut pour démontrer l’efficacité de sa méthode n’ont pas été publiées dans des revues scientifiques, et ne sont pas mentionnées sur sa page personnelle au sein
de son université. Il ne suit pas son propre programme d’entraînement, arguant que son métier lui permet bien assez de stimuler son cerveau, ce qui se conçoit. Mais étrangement, il ne l’applique pas non plus à ses enfants : d’ailleurs ils n’ont droit en tout et pour tout qu’à une heure de jeux vidéo par semaine, et rien n’indique qu’ils se ruent alors sur le logiciel de papa. Une des dernières marottes du Dr Kawashima est la cuisine : à grand renfort d’imagerie cérébrale, il a montré que préparer un petit plat active le cortex préfrontal puisqu’il faut sélectionner les ingrédients, les mitonner tantôt l’un après l’autre et tantôt en même temps… Autant de coordinations et de petites stratégies assurées par cette partie du cerveau. R. Kawashima va-t-il encourager les Japonais à la popote ? En tout cas, ses études culinaires ont été financées par une marque de fours qui ne demanderait pas mieux qu’un partenariat plus étroit…