Schizophrénie : la grande inconnue

Plurielle, stigmatisante et finalement méconnue, la schizophrénie est-elle insaisissable ? Que sait-on exactement sur elle ? Peut-on s’en sortir ou doit-on vivre avec ?

Schizophrénie : la grande inconnue - Les Grands Dossiers des sciences humaines n°76

© Brooke DiDonato

La schizophrénie est une maladie très mal connue non seulement du grand public, mais aussi de la plupart des professionnels de santé. Elle véhicule des représentations le plus souvent négatives. Dans la croyance populaire, les schizophrènes sont considérés comme des « personnes dangereuses » et ce lieu commun est parfois même repris dans les médias. Pourtant la littérature scientifique montre, de façon indiscutable, que cette croyance est totalement infondée, et préfère même utiliser les termes « troubles schizophréniques » ou « schizophrénies » (au pluriel) pour souligner la diversité des formes cliniques et le caractère hétérogène des symptômes rencontrés dans cette maladie. En effet, les travaux scientifiques tendent à montrer que « les troubles schizophréniques » sont constitués de maladies différentes, mais avec des points neurocognitifs communs.

Trois séries de symptômes

Le terme « schizophrénie » fut proposé en 1911 par Eugen Bleuler. Ce médecin suisse regroupait déjà dans cette entité différentes maladies mentales (la catatonie, l’hébéphrénie et le délire paranoïde) ayant, selon lui, un processus pathologique commun : un dysfonctionnement ou un « relâchement des associations » normales du cerveau humain. Pour Eugen Bleuler, ce dysfonctionnement psychologique se traduit par une scission de la pensée des malades, d’où sa proposition du terme « schizophrénie » : « schizo » (qui signifie scinder ou couper en grec) et « phrénie » (l’esprit).

La « schizophrénie » est donc une modélisation psychologique pathologique de maladie mentale qui s’inscrit pleinement dans le mouvement associationniste en vogue au 19e siècle.

La clinique contemporaine s’articule autour d’une approche tridimensionnelle des troubles schizophréniques :

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• les symptômes positifs : il s’agit des manifestations bruyantes de la maladie : agitation, délire, hostilité, méfiance, hallucinations… ;

• les symptômes négatifs : il s’agit de la perte de fonctions normales qui se traduit par l’apragmatisme, le retrait social, la pauvreté de la pensée et du discours, l’appauvrissement des émotions… ;