Selon un principe darwinien bien établi, les individus sont en compétition pour se reproduire. Dans le monde animal, mâles et femelles correspondent à deux stratégies reproductives, et sont donc souvent de morphologie et de comportement différents. Deux mécanismes expliquent ces différences : la compétition entre mâles, qui souvent se battent, ou le choix des femelles, qui recherchent des attributs particuliers parmi les prétendants. Lorsque c’est réalisable, un mâle va chercher à se réserver plusieurs femelles, en fait le plus possible : une bonne façon d’augmenter son nombre de descendants, au détriment des autres mâles. Ainsi, aussi bien chez le cerf, le gorille ou l’éléphant de mer, les mâles dominants ont un accès exclusif à un harem de plusieurs femelles, qui sont parfois nombreuses. Évidemment, une telle situation est le résultat de nombreux combats, qui sélectionnent des mâles combatifs et agressifs.
Qu’en est-il pour l’homme ? La situation est délicate, car il y a une réticence en sciences humaines à envisager que les stratégies reproductives puissent contribuer à expliquer l’histoire humaine. En fait, les stratégies reproductives sont généralement passées sous silence : ni l’écolier ni l’étudiant n’en entendent parler dans les cours d’histoire.
L’histoire commence à Sumer, avec les premières citées, et les premières sociétés fortement hiérarchisées. L’invention récente de l’agriculture a permis l’accumulation et l’accaparement des ressources : les grandes inégalités sociales entre les individus apparaissent pour la première fois. Certains hommes ont monopolisé les ressources, y compris les ressources reproductives. Dans toutes les grandes sociétés qui sont apparues dans les différentes régions du monde, au Moyen-Orient, en Inde, en Chine, en Asie du Sud-Est, en Afrique, en Amérique du Nord, en Amérique du Sud, etc., les hommes au sommet de la hiérarchie avaient un accès sexuel exclusif à des dizaines, couramment des centaines et très souvent des milliers de femmes. Par exemple, il y a 2 600 ans, l’empereur de Chine entretenait 10 000 femmes pour son usage ; chez les Incas, le harem royal comptait 1 500 femmes et, au XVIIe siècle, Moulay Ismaïl, roi du Maroc, de l’Algérie et de Mauritanie, en possédait 500. Souvent, ces femmes sont des captives de guerre, comme l’attestent les écrits du passé, y compris la Bible.