Entretien avec Nancy Green

Sciences Humaines : Les débats autour de l'immigration qui agitent la société française sont-ils concevables aux Etats-Unis ?

Nancy Green : Bien sûr. Il y a une fraction de la population américaine traditionnellement hostile à l'immigration. En France, on imagine un pays toujours grand ouvert aux migrants. Cela témoigne d'une méconnaissance de l'histoire de l'immigration aux Etats-Unis. Celle-ci a aussi connu de sombres périodes avec des poussées de xénophobie. Il y eut ainsi des périodes où la France a paru beaucoup plus ouverte que les Etats-Unis, les années 20 par exemple. Ironie de l'histoire, il est probable que beaucoup de candidats à l'immigration vers les Etats-Unis se sont finalement arrêtés en France.

Quoi qu'il en soit, ces deux pays ne figurent-ils pas parmi les plus vieux pays d'immigration ?

Sans doute mais cette réalité n'a pas été valorisée de la même façon. En France, la mémoire collective a été réticente à entretenir le souvenir de cette longue histoire d'immigration. La société américaine, elle, la met en avant, quitte à en oublier les moments troubles, les manifestations de xénophobie comme les poussées en faveur d'une assimilation forcée.

Cependant, en France, les choses évoluent comme en témoigne la création prochaine d'un musée d'Histoire de l'immigration. Un tel musée peut montrer aux Français l'importance des immigrations et ce bien avant la Révolution. Il contribuera aussi à rendre justice au rôle des immigrants d'hier et d'aujourd'hui, en soulignant les difficultés qu'ils n'ont cessé de rencontrer au cours de leur intégration.