Une des grandes faiblesses de l’Europe est sa dépendance croissante en matière énergétique, faiblesse que l’on a pu mesurer à l’occasion du renchérissement des hydrocarbures provoqué à partir de 2004 par la conjonction de la crise au Moyen-Orient et de la demande croissante en Chine. Aussi, en ce début de XXIe siècle, la question des choix énergétiques à faire pour l’avenir devient d’une singulière acuité pour tous les États-membres de l’Union européenne.
Le premier importateur d’énergie du monde
L’Union européenne (UE), qui consomme environ 16 % de l’énergie mondiale, est le premier importateur du monde. De 1994 à 2004, le taux de dépendance énergétique de l’Union a considérablement augmenté, puisqu’il est passé de 43 à 50,5 % (Eurostat 2007). Les hydrocarbures jouent un rôle primordial dans cette situation. Le pétrole et le gaz naturel, qui ont fourni 61 % de la consommation énergétique en 2004, doivent être en grande partie importés. Les seuls gisements européens importants sont ceux de la mer du Nord qui fournit actuellement la moitié du gaz et un quart du pétrole consommé en Europe. Mais les réserves sont limitées et à l’horizon 2025 les hydrocarbures de la mer du Nord seront pratiquement épuisés ; l’Europe devra alors importer la totalité du pétrole et du gaz naturel de régions plus éloignées et géopolitiquement sensibles comme la Russie, l’Asie centrale et le Moyen-Orient. Comme par ailleurs l’Europe importe de plus en plus de charbon, la dépendance énergétique totale de l’Union européenne pourrait atteindre 80 % en 2030.
Malgré les discours tenus sur la nécessité d’économiser l’énergie, la consommation continue, elle, de croître à un rythme soutenu. De 1990 à 2004, l’augmentation a été de 10 % pour l’ensemble de l’Europe des 27, mais il faut souligner une divergence d’évolution en ce qui concerne les nouveaux entrés en 2004, ex-pays du bloc soviétique. Pour eux, la restructuration économique qui a suivi l’effondrement des régimes communistes a permis de faire diminuer la consommation de plus de 20 % contre une augmentation de 18 % dans l’Europe des 15. C’est dans les pays plus pauvres de l’Europe du Sud que la progression a été la plus forte, atteignant 67 % en Espagne et même 79 % au Portugal. Cette évolution est la conséquence des progrès économiques et de la modernisation de ces pays dont la consommation énergétique moyenne reste toutefois près de deux fois inférieure à celle des pays d’Europe du Nord et du Nord-Ouest. Chez les nouveaux entrants, la consommation d’énergie est aussi deux à trois fois plus faible que dans l’Europe industrielle et développée. Mais après avoir fortement baissé entre 1990 et 2000, la consommation d’énergie repart depuis en raison des progrès économiques accomplis qui permettent par exemple une plus large diffusion de la voiture individuelle.
C’est en effet le secteur des transports qui est devenu, devant l’industrie, le premier secteur de consommation énergétique de l’Europe des 27. Les besoins en pétrole ont donc fortement progressé et nécessité d’importer entre 1994 et 2005 près de 90 millions de tonnes supplémentaires. La progression a été spectaculaire dans les pays d’Europe centrale et du Sud entre 1994 et 2004 : + 50 % en Espagne, + 55 % au Portugal, et même + 90 % en République tchèque !
Cependant, pour l’ensemble de l’Union, c’est le gaz naturel qui a le plus augmenté, passant devant le charbon avec environ un quart de l’énergie des 27. Les importations de gaz naturel, employé pour le chauffage domestique et pour la production d’électricité, ont doublé entre 1994 et 2005. Cette évolution a beaucoup contribué à l’augmentation de la dépendance énergétique de l’Europe (voir carte ci-contre).
Face à cette évolution, l’un des objectifs de l’Union européenne est de renforcer l’intégration de la politique et des marchés énergétiques européens. Il s’agit notamment de développer une politique commune vis-à-vis des fournisseurs comme la Russie avec laquelle l’UE a développé un partenariat énergétique. Mais une politique européenne apparaît d’autant plus difficile à mettre en œuvre qu’il existe à l’intérieur de l’Union une grande diversité de situations et d’intérêts, en raison de l’inégalité des ressources et de choix politiques influencés par des considérations économiques, géopolitiques ou environnementales.