Le sujet des violences en milieu scolaire n’est pas nouveau. La littérature scientifique a abondamment traité la question, bien avant que ces trois dernières décennies les médias en fassent leurs gros titres, et les politiques une priorité. Ce qui a changé récemment, c’est le regard porté sur cette violence. L’évolution des requêtes des internautes en est un excellent indice : « les violences scolaires », qui représentaient l’essentiel des recherches entre 2004 et 2011, ont depuis été supplantées par le « harcèlement* scolaire ».
Jusqu’au début des années 2010, en France, la violence à l’école a été abordée uniquement à travers le prisme des intrusions accompagnées de violences ou des violences létales comme les tueries (school shootings) qui endeuillent régulièrement les États-Unis. Il était alors logique pour y remédier, de faire appel à un traitement externalisé et à une « sanctuarisation » des établissements qui devaient être clos et protégés d’éventuels envahisseurs. Cette approche sera pendant des années le point de départ des politiques publiques, et des douze premiers « plans de lutte contre la violence », passage obligé de tous les ministres de l’Éducation. De cette logique a également procédé la création des « équipes mobiles de sécurité », le développement de la vidéoprotection et les protocoles école-police-justice, du plan Jospin de 1991 au plan Chatel-Hortefeux de 2009.
Cependant, à partir des années 1990, le développement de la recherche, conjugué à la médiatisation de plusieurs faits divers dramatiques puis l’irruption de la cyberviolence et du cyberharcèlement*, et plus récemment un certain effet « #MeToo », ont contribué à remettre en cause ce modèle et à infléchir les politiques publiques, permettant un début de prise en compte des victimes.