Haro sur les violences sexuelles !

D’abord centrées sur le viol, les luttes féministes se sont déployées pour dénoncer aujourd’hui toutes les formes de violence sexuelle et le sexisme en général.

1623337062_facebook-shared-image.jpeg

La question des violences à caractère sexuel connaît une double actualité en France : objet de discours et de politiques publiques, elles ont également été très médiatisées à la faveur du mouvement #MeToo et de la multiplication des mobilisations associées sur les réseaux sociaux avec #BalanceTonPorc, #MeTooGay ou #MeTooInceste ou encore avec les manifestations de rue contre les violences sexistes et sexuelles. Comment ces violences sont-elles devenues un problème politique ? 

La politisation des violences à caractère sexuel prend racine dans le Mouvement de libération des femmes qui émerge en France en 1970. Les féministes se sont emparées des questions sexuelles pour dénoncer les rapports de domination et les violences que subissent les femmes. À l’image du slogan phare du MLF « Le personnel est politique », les féministes ont créé des espaces non mixtes où elles échangeaient sur des préoccupations quotidiennes ou intimes, liées à la sexualité, au corps, à la répartition des tâches domestiques, en les considérant comme les reflets des inégalités et des rapports de domination.

Menace de viol et climat de peur

La violence est présentée comme l’un des symptômes de la domination masculine dans les textes féministes de l’époque. Par exemple, le numéro de Partisans intitulé « Libération des femmes, année zéro » en 1970 raconte à la première personne l’expérience d’une femme violée : « Le viol, conjugal ou non, est encore la forme typique, réalisée à un degré ou à un autre, des relations entre les sexes. » Inscrite dans le fonctionnement normal des rapports sociaux, la violence sexuelle n’en est pas pour autant banalisée. Au contraire, l’ampleur du phénomène et les conséquences sur la vie des femmes sont également dévoilées, notamment lors de rassemblements dédiés à la construction d’une parole collective, politique, sur les expériences de violences. C’est le cas des speak out, au milieu des années 1970 aux États-Unis, ou des « dix heures contre le viol », à la Mutualité à Paris en 1976. Le cadre de compréhension féministe qui se développe élargit l’analyse au-delà des seuls actes d’agression en soulignant que toutes les femmes subissent les effets des violences sexuelles, directement ou indirectement. La menace de viol, qui repose sur l’idée faussée selon laquelle l’extérieur du foyer et les inconnus seraient particulièrement dangereux, maintient les femmes dans un climat de peur et façonne leur manière d’être et d’agir. Cette approche est développée dans certains textes, comme le livre Against Our Will, de Susan Brownmiller 1, et impulse l’organisation de manifestations telles que Take Back The Night, qui signifie reprenons la nuit, ou d’activités comme les groupes d’autodéfense féministes.