Vivre sans capitalisme ?

Jérôme Baschet : « La croissance, c'est comme une religion »

Le capitalisme menace notre planète : supprimons-le ! La tâche est ardue, mais pas impossible si l’on repositionne échanges, production et consommation à une échelle plus modeste, affirme Jérôme Baschet, partisan de la relocalisation.

Pourquoi le projet de sortir du capitalisme connaît-il un renouveau ?

Les critiques du capitalisme se sont longtemps concentrées sur l’exploitation du travail et les inégalités de classes, ou encore sur l’aliénation de nos rapports aux autres et au monde passés sous l’emprise de la marchandisation et de l’argent. Tout cela reste pertinent, mais ce qui vient désormais au premier plan est la destruction du vivant et l’altération du système Terre, au point de mettre en péril l’habitabilité de la planète pour de nombreuses espèces, y compris les humains. Le capitalisme est devenu une force d’échelle géologique qui a fait basculer la Terre dans une nouvelle période de son histoire, baptisée Anthropocène ou Capitalocène. Ce bouleversement fait planer une menace existentielle sur l’humanité elle-même.

Cette menace est-elle impossible à affronter dans les conditions actuelles ?

On ne peut pas exclure que le capitalisme tente de mener à bien une transition énergétique visant à contenir le réchauffement climatique, car certains secteurs ont pris conscience de sa nécessité. Mais les résistances sont nombreuses et les biais productivistes sont des freins puissants, de sorte que le scénario le plus probable est qu’une telle transition interviendra trop tard et sera insuffisante. C’est donc une période très sombre qui s’annonce si nous ne sommes pas capables de proposer une alternative entièrement repensée et reformulée, à la fois hors du capitalisme et loin des tragiques expériences révolutionnaires du 20e siècle. Cela n’a rien d’impossible : rappelons que le capitalisme est un système assez récent, né il y a cinq siècles selon certains ou bien deux siècles et demi pour d’autres, dont je suis. Comme tout phénomène historique, il a un début et aura une fin.