Brigitte est en seconde. Elle a choisi l'économie en option parce qu'elle veut faire du commerce international avec la Chine. En début d'année, par petits groupes, son professeur les a initiés à la recherche documentaire au CDI (centre de documentation et d'information) pour qu'ils puissent « se débrouiller seuls dans leurs recherches d'informations ». Leur professeur a pratiqué ici un type d'autoformation dite « éducative ». Brigitte est très contente de cet enseignement car elle a découvert de nouveaux ouvrages et des sites Internet sur la Chine. Elle va pouvoir pratiquer une autoformation « intégrale », seule chez elle. En dehors du lycée, Brigitte suit des cours de cantonais depuis deux ans. C'est une forme d'autoformation dite « sociale ». Grâce à sa mère qui fait de la généalogie, elle a appris que l'un de ses ancêtres importait de la soie de Chine sous Louis XIV. Sa mère s'adonne à une forme d'autoformation dite « existentielle ».
L'autoformation, c'est un peu l'auberge espagnole, avoue le spécialiste en la matière, Philippe Carré 1, et l'exemple précédent nous en donne une illustration. Aussi, la limiter à une méthode pédagogique, comme celle de l'entraînement mental développée par Joffre Dumazedier (voir l'encadré, p. 18), est extrêmement restrictif. Alors qu'est-ce que l'autoformation ? Bien sûr, c'est apprendre par soi-même mais c'est surtout, selon la définition de P. Carré, un processus individuel et/ou un fait social. Voyons comment se déclinent ces deux problématiques.
- Sous l'angle de l'individu, l'autoformation peut, tout d'abord, permettre d'« apprendre à être » ou d'« apprendre à produire sa vie » par, selon l'expression de Gaston Pineau, « une appropriation par le vivant de son pouvoir de formation ». L'homme est ici considéré comme un être apprenant toute sa vie, des autres mais aussi de son environnement. Dans cette acception, G. Pineau assimile l'autoformation à « un processus vital, ontologique, de mise en forme de l'être » 2.
- Toujours d'un point de vue individuel mais cette fois dans une version moins essentialiste, l'autoformation intégrale consiste à apprendre hors des systèmes éducatifs. C'est ce que l'on appelle communément l'autodidaxie. Par la lecture de livres ou de revues (dont Sciences Humaines), l'écoute ou le visionnage d'émissions de radio ou de télévision, de cassettes audio ou vidéo, l'individu peut se former à l'économie, la sociologie, la psychologie, etc.
- Enfin, l'autoformation est cognitive lorsqu'elle se donne pour mission d'apprendre de façon autonome. Cet aspect est très développé dans les pays anglo-saxons, note P. Carré. En France, on parlera de self-learning et de développement des compétences de l'apprenant. Voilà pour la face individuelle de l'autoformation. Mais elle est aussi sociale et ceci apparaît souvent de façon moins évidente.