L'erreur de Broca

L’Erreur de Broca. Exploration d’un cerveau éveillé , Hugues Duffau, Michel Lafon, 2016, 282 p., 17,95 €.

En 1994 le neuropsychologue Antonio Damasio signait L’Erreur de Descartes, une attaque retentissante du lieu commun cartésien voulant que nos émotions parasitent nos réflexions et prises de décision. En 2016, Hugues Duffau, responsable du département de neurochirurgie du CHU de Montpellier, directeur de recherche à l’Inserm sur la plasticité cérébrale, lauréat de la médaille Herbert-Olivecrona (l’équivalent du prix Nobel de médecine), dégaine son Erreur de Broca pour régler son compte au saint patron de la neuropsychologie. Résumé des épisodes précédents : en 1861, la phrénologie bat de l’aile. Cette pseudoscience, pendant une cinquantaine d’années, a tenté de corréler facultés et émotions humaines à des protubérances crâniennes, dont la célébrissime « bosse des maths ». Paul Broca, fondateur de la Société d’anthropologie et chef du service de chirurgie à Bicêtre, autopsie un malade qui avait perdu l’usage de la parole, et relève une lésion de la troisième circonvolution frontale gauche. Il n’adhère pas à la phrénologie, mais croit aux localisations cérébrales. Il estime donc avoir déniché le siège du langage articulé, la future « aire de Broca ». Cette découverte sera confirmée par d’autres cas cliniques : la neuropsychologie est née, et la classification des aphasies selon les symptômes observés et les lésions cérébrales sous-jacentes est enseignée jusqu’à nos jours.