L'exil à Babylone, creuset du judaïsme

La chute de Jérusalem et la déportation de son élite auraient pu entraîner la destruction de la culture israélite. Il semble pourtant que ce soit dans l’épreuve de l’exil que les Judéens sont devenus Juifs.

17138850860_EXIL_BABYLONE_JUIFS_TW.webp

La prise de Jérusalem par le roi néobabylonien Nabuchodonosor II en 587 avant notre ère marque un tournant capital dans l’histoire de l’ancien Israël. La disparition de la royauté, la destruction du Premier Temple de Jérusalem et la déportation de l’élite judéenne en Babylonie sont apparues comme une catastrophe susceptible de rayer de l’histoire la tradition israélite et judéenne. Le royaume de Juda (encadré ci-dessous) devint une petite province néobabylonienne, essentiellement rurale, autour de Mizpa, sa capitale provisoire au nord de Jérusalem, tandis que les déportés risquaient fort d’être absorbés dans la culture internationale de l’Empire néobabylonien.

Assez paradoxalement, l’historien constate le résultat inverse : avec le temps, la crise de la chute de Jérusalem en - 587 aboutit à la restructuration du peuple judéen/juif autour d’une tradition culturelle et religieuse précisée et profondément rénovée. La documentation à notre disposition ne permet pas de tout expliquer mais aide à mieux comprendre cette transformation en tenant compte de son contexte historique.

 

Une « nouvelle Jérusalem » en Babylonie

Un certain nombre de tablettes cunéiformes néobabyloniennes confirment les allusions du livre d’Ézéchiel d’après lesquelles la déportation s’est effectuée en gardant les structures communautaires. Les déportés venant d’une même ville se sont retrouvés ensemble en Babylonie. C’est ainsi que les tablettes al-Yahudu montrent que les habitants de Jérusalem ont été installés dans une sorte de « Nouvelle Jérusalem » en Babylonie. Ce regroupement communautaire a permis une réflexion religieuse intense, d’abord pour expliquer les causes de la catastrophe, puis pour tirer les conclusions de la confrontation avec la culture et la religion néobabyloniennes.

publicité

S’appuyant sur la longue tradition iconographique israélite, cette confrontation aboutit au rejet des divinités mésopotamiennes représentées par des statues et, bientôt, à l’affirmation que seul le dieu d’Israël, non représenté par des statues, était Dieu, avec insistance sur son rôle créateur et sur son caractère universaliste. Il s’agissait là d’une sorte de révolution religieuse. À partir de cette date, la religion israélite devient proprement monothéiste alors que, durant toute l’époque royale, le culte du dieu d’Israël était seulement monolâtrique, les plus anciens textes bibliques reconnaissant comme normal que les autres peuples aient d’autres dieux.