1 - Le christianisme n’est pas la chrétienté
La première confusion porte sur l’association plus que discutable entre le christianisme (comme religion mondiale qui rassemble catholiques, protestants, orthodoxes, évangéliques) et la « chrétienté », puissance de l’Église catholique et romaine qui a dominé l’Europe pendant un millénaire. Le monde que l’on appelait à l’époque « la chrétienté » recouvre chronologiquement la période du Moyen Âge, de 500 à 1500. La chrétienté connut son apogée aux 11e et 12e siècles au temps des cathédrales et des croisades. À l’est de l’Europe, ce fut le temps de la splendeur de Byzance. Puis à partir de la Renaissance, vers 1450, l’Église chrétienne a commencé à voir son emprise sur la société décliner : Église et pouvoir politique se sont séparés progressivement ; le monde des idées – philosophie, sciences, arts – s’est affranchi du magistère de l’Église ; l’adhésion des populations au christianisme a commencé son reflux. Ce mouvement a été analysé depuis bien longtemps par les sociologues et philosophes : Nietzsche, quant à lui, y voyait la « mort de Dieu ». Marcel Gauchet reprendra à Max Weber le terme de « désenchantement du monde » pour décrire la sécularisation de la société.