◊ Faut-il parler d’extrême gauche ?
Faut-il parler d’« extrême gauche » ou de « gauche radicale » ? Selon le politiste Philippe Corcuff, la dénomination « extrême gauche » était utilisée jusque dans les années 1970, dans le sillage de Mai 68, pour qualifier les groupes politiques situés à gauche du Parti communiste : anarchistes, troskystes, léninistes, internationalistes, etc. Contrairement aux communistes staliniens, ces groupes défendaient l’autogestion (par exemple les libertaires) ou encore l’autoémancipation des ouvriers (trotskysme). Après Mai 1968, beaucoup sont devenus responsables associatifs ou représentants syndicaux.
En 1995, l’extrême gauche est rejointe par le PCF lors des grandes grèves syndicales. Le terme « gauche radicale » – englobant le PCF – commence à s’imposer, au détriment de l’expression « extrême gauche » (rejetée par une partie des militants). Cette évolution a lieu dans un contexte politique marqué par la chute du bloc communiste et le ralliement général des populations aux valeurs de la démocratie libérale. Un politiste allemand, Uwe Backes, souligne ainsi que l’extrémisme est « hostile au noyau de la Constitution », tandis que le radicalisme peut être assimilé à la « poursuite d’objectifs politiques radicaux à l’intérieur du cadre institutionnel donné » (Les Extrêmes en politiques. Un historique du terme et du concept de l’Antiquité à nos jours, Cerf, 2011).