La revendication de droits politiques pour les femmes est posée en France dès la Révolution avec la brochure de Condorcet Sur l’admission des femmes au droit de cité (1790) ou encore la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne d’Olympe de Gouges (1791). Elle s’exprime de nouveau au début des années 1830, avec les saint-simoniennes, puis en 1848 où tous les hommes, mais non les femmes, obtiennent le droit de vote. Elle ne prend cependant de l’ampleur que sous la Troisième République.
Dès les années 1880, une jeune militante, Hubertine Auclert (1848-1914) pose la revendication suffragiste comme prioritaire car qui ne vote pas ne compte pas. Elle est toutefois minoritaire dans le mouvement féministe de l’époque qui considère que les femmes ne sont pas prêtes pour voter et qu’il faut d’abord demander une meilleure éducation, le droit au travail et des droits civils. En France, comme dans d’autres pays du monde, la revendication suffragiste ne devient prioritaire au sein du féminisme qu’au début du 20e siècle. En 1904, naît l’Alliance internationale pour le suffrage des femmes (AISF) puis, en 1909, sa branche française, l’Union française pour le suffrage des femmes (UFSF).
Le mouvement suffragiste est cependant divisé entre une majorité modérée et une minorité plus radicale. La majorité (UFSF, Conseil national des femmes françaises, Ligue française pour le droit des femmes) insiste dans son argumentaire sur l’effet positif du vote des femmes dans la lutte contre les fléaux sociaux ; elle accepte aussi un suffrage par étapes (d’abord municipal pour apprendre et faire ses preuves, puis intégral) ; elle n’utilise enfin que des modes d’action républicains (pétitions, presse, meetings). La minorité radicale réclame le vote intégral, met en avant les notions d’égalité et de droits et utilise parfois des moyens considérés comme violents : ainsi, lors des élections de 1908, bris d’une vitre de salle de vote ou renversement d’une urne. Elle présente aussi des candidates aux élections législatives de 1910 et aux municipales de 1912. La presse et la majorité des suffragistes qualifient péjorativement ces militantes de « suffragettes », du nom des Britanniques de la Women’s Social and Political Union et de leur journal The Suffragette qui, derrière Emmeline Pankhurst (1858-1928) et ses filles, mènent un véritable bras de fer avec les autorités et ne reculent pas devant l’usage de la violence et du martyre.