Nous nous plaisons à imaginer « que les humains ont inventé les rituels funéraires pour arrêter d’oublier ». Et mieux encore, que c’est « ce geste démiurgique qui a fondé l’humanité et la culture », observe l’anthropologue Grégory Delaplace, spécialiste de la Mongolie. Dans ce nouvel essai, il avance une autre hypothèse : celle d’un monde où « le fantôme précède l’ancêtre » et où les humains enterrent leurs morts pour « cesser de subir leur permanence intempestive ». Des Waris brésiliens (qui consommaient la chair des défunts) aux Tziganes (qui brûlent ce qui leur a appartenu et s’interdisent de prononcer leur nom), en passant par l’Afrique, la Mongolie ou encore l’Europe médiévale, l’auteur montre que par-delà leurs différences, les rites funéraires ont en commun de faire « l’éducation des morts », afin de leur assigner une place dans la société et transformer leurs spectres menaçants en ancêtres bienveillants.