Le crime de masse dans l'histoire du droit

Considérer un massacre comme un crime est une avancée récente du droit international. Avancée confirmée par la création de la Cour pénale internationale.

Depuis l'apparition des premiers Etats, et jusqu'à très récemment, le massacre n'était pas un crime mais plutôt « une forme de châtiment plus ou moins légal 1 » !

Durant l'Antiquité, les punitions collectives marquaient l'expression de l'autorité de l'Etat : par exemple, à l'époque suméro-babylonienne, le roi Rîm-Sîn pratiquait le meurtre légal des familles de ses opposants politiques. Dans les cités-Etats de la Grèce classique, le massacre des barbares semblait une évidence, mais un « droit de la guerre » était plus ou moins en marche puisqu'on prônait le respect des adversaires qui faisaient partie du monde grec. Au Moyen Age, le droit canonique (chrétien) est resté sourd aux massacres des hérétiques, musulmans ou païens...

En réalité, c'est seulement au XXe siècle que le massacre apparaît comme objet de droit. Le génocide arménien (1 200 000 morts) perpétré par les Turcs pose la question du crime de masse, mais le traité de Sèvres (1920) ne permet pas de juger celui-ci. Le massacre va être intégré au droit pénal international avec l'apparition de trois objets juridiques :

? le « crime de guerre », défini en 1929 par la convention de Genève : tuerie pratiquée sans respect de certaines règles normatives, dans le cadre ou en marge d'un conflit ;

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? le « crime contre l'humanité », adopté en 1945-1946 au tribunal de Nuremberg : crime commis délibérément lors d'attaques contre des populations civiles ;

? le « génocide », adopté en 1949 par l'Onu : crime de masse visant la destruction, totale ou partielle, d'une population pour des motifs politiques, raciaux, ethniques ou religieux.

L'entrée en vigueur de la Cour pénale internationale (CPI, avril 1993) est depuis lors venue confirmer que le massacre est bel et bien un objet de droit. Avec cette évolution récente de la pénalisation des massacres, lesquels sont commis principalement lors d'actions de guerre, on peut s'interroger sur celle-ci et espérer qu'un jour, peut-être, elle sera reconnue comme un crime contre l'humanité et les militaires comme des « massacreurs » en puissance 2 !