◊ De quoi parle-t-on exactement ?
Décrochage, rupture, abandon, déscolarisation… De nombreux termes sont récemment apparus pour désigner ce que l’on qualifiait autrefois, de manière générique, d’échec scolaire. Ils recouvrent cependant des réalités diverses 1.
Deux textes ministériels récents (31 décembre 2010 et 10 février 2011) précisent la notion de décrocheur, défini institutionnellement comme un jeune qui quitte prématurément un système de formation initiale, sans avoir obtenu ni le baccalauréat, ni un diplôme à finalité professionnelle de niveau V ou IV (BEP ou CAP) et qui n’est plus inscrit dans un cycle de formation. Une définition qui a pour défaut d’agréger des situations très différentes (abandon volontaire, exclusion, non-réinscription après l’échec à un examen) et d’éluder les causes profondes du phénomène.
Le décrochage est en effet moins un état qu’un processus de désengagement ou de démobilisation scolaire qui se construit sur une durée longue, parfois dès la scolarité primaire. Si certaines régularités structurent le risque de décrocher, c’est l’attention à la singularité des trajectoires qui permet de comprendre le phénomène.
◊ Une préoccupation européenne
Au niveau européen, on parle d’early school leavingpour désigner les 18-24 ans disposant, tout au plus, d’un diplôme du premier cycle de l’enseignement secondaire et qui ne suivent ni études ni formation. Une situation qui, en 2009, concernait 14,4 % de cette génération, et plus spécifiquement sa frange la plus vulnérable au plan social, économique et culturel. Parmi ces jeunes, 17,4 % n’ont même suivi qu’un enseignement primaire.
Le taux européen de décrocheurs est en baisse de trois points depuis 2000, mais encore éloigné de l’objectif de 10 % fixé… pour 2010. Les disparités sont cependant importantes : sept États membres (avec en tête la Slovaquie, la Slovénie, la Pologne et la République tchèque) ont déjà atteint cet objectif alors que trois autres ont des taux supérieurs à 30 % (Espagne, Portugal et Malte). Pour mémoire, en 2010, 12,6 % des Français âgés de 18 à 24 ans sont des « sortants précoces », une situation stationnaire depuis quelques années.
Les raisons de cet abandon scolaire sont diverses. Dans certains États membres, il s’agit essentiellement d’un phénomène rural, où des régions excentrées posent des problèmes d’offre et d’accès à l’éducation. Dans d’autres États, l’abandon scolaire se produit majoritairement dans les zones défavorisées des grandes villes. Enfin, localement, certains marchés saisonniers de l’emploi (tourisme, agriculture, bâtiment) peuvent détourner les jeunes en les incitant à prendre un travail, certes peu qualifié et temporaire, mais disponible immédiatement.