Isabelle est une assistante dévouée et performante, elle remplit parfaitement les missions qui lui sont confiées. Son directeur lui reproche depuis plusieurs mois son manque de disponibilité et son ton sec quand elle prend des clients au téléphone. Malgré ses qualités, sa bonne volonté et l'insistance de son directeur pour qu'elle améliore sa qualité d'écoute, Isabelle ne change pas. A sa demande, elle vient de suivre une formation spécifique à l'accueil téléphonique. Il faut bien admettre que les résultats ne sont pas probants.
Pour analyser ses difficultés à faire évoluer son comportement, Isabelle doit essayer de décrire ce qu'elle ressent quand elle a un client en ligne. Elle décrit un état de tension et surtout un sentiment diffus de culpabilité. En amont de cette émotion pénible, la représentation d'Isabelle est la suivante : «Quand je réponds au téléphone, je ne fais pas mon travail, j'ai l'impression de perdre mon temps.» Dans ces conditions, il est facile de comprendre que ses tentatives de changement sont parasitées par l'émotion.
L'histoire d'Isabelle illustre différents aspects du changement : tout d'abord, la persistance d'un comportement malgré des efforts sincères de changement. La résistance au changement ne traduit ni un manque de motivation, ni de la mauvaise foi. Isabelle ressent une émotion négative, qui ne fait qu'augmenter au fur et à mesure qu'elle essaye d'investir plus de temps dans son contact avec le client : plus elle est attentive aux clients, plus son impression de perdre son temps augmente.
Cette histoire révèle aussi un principe essentiel : le changement se perçoit dans la modification du comportement de quelqu'un. On peut donc le ramener à l'apprentissage de nouveaux comportements. Mais si l'apprentissage élémentaire consiste en une simple modification du comportement, les apprentissages les plus décisifs reposent le plus souvent sur une modification des connaissances et des représentations.
La plupart du temps, l'homme s'adapte spontanément, sans grandes émotions. L'homme reste le système le plus sophistiqué pour s'adapter au changement. Dans certains cas plus rares, le changement dépasse la simple adaptation ; il sollicite les capacités de réflexion et déclenche des réactions émotionnelles conséquentes.
Différents niveaux de changement
Les différentes théories du fonctionnement psychologique rendent compte des conditions d'apparition des comportements. Si chaque modèle apporte des éléments intéressants pour analyser le changement personnel, on peut, pour simplifier l'analyse, distinguer deux types de fonctionnement psychologique: les processus automatiques et les processus contrôlés. Un comportement automatique classique est celui que l'on a développé dans la conduite automobile. L'automatisme est même parfois tel qu'il n'est pas rare de faire une erreur de trajet en se rendant machinalement à son domicile plutôt qu'au lieu du rendez-vous. A l'opposé, un exemple de processus contrôlé est celui nécessaire pour rédiger un texte ou mener une négociation. Il faut à ce moment mobiliser toutes ses capacités d'attention et de concentration.