Le vampire, patchwork de nos peurs

Les vampires sont les créatures les plus intéressantes du genre « horreur/fantastique ». Ils sont plus intelligents que les zombies, ont une vie émotionnelle plus riche que les loups-garous, et paraissent plus dangereux que les fantômes. Pour cause, ils sont un mélange de tous les monstres qui hantent l’Europe depuis le 18e siècle, leur empruntant à chaque fois les caractéristiques les plus effrayantes et fascinantes. Dans son enquête sur le sens du mot « vampire » à travers l’histoire, le sociologue Arnaud Esquerre montre que ce nom à l’étymologie mystérieuse désigne d’abord des morts qui s’en prennent aux vivants. Le terme apparaît notamment en 1746, dans un traité du moine lorrain Augustin Calmet, mais aussi dans des articles philosophiques ou médicaux. En plein siècle des Lumières, les intellectuels recherchent une définition scientifique de la mort et s’interrogent sur le traitement à réserver aux cadavres. Il n’est pas étonnant que le mythe du mort-vivant émerge au même moment… Parallèlement, des naturalistes reviennent d’Amérique où ils ont découvert des chauves-souris suceuses de sang – particulièrement effrayantes pour des Européens habitués aux petites roussettes ! Dans sa classification des espèces, le comte de Buffon les trouve monstrueuses et décide de les nommer « vampires ». Les amateurs de légendes emprunteront ensuite au loup-garou sa capacité de métamorphose, pour expliquer que ces créatures aient tantôt l’air d’humains et tantôt de chauves-souris.