Entretien avec Margaret Maruani

« Les femmes travaillent beaucoup plus que les hommes... »

De profonds changements ont eu lieu concernant le travail des femmes depuis un demi-siècle. Pouvez-vous rappeler les grandes évolutions et faire le point sur la situation actuelle ?

Il faut préciser que les femmes ont toujours travaillé. Mais leur accès massif au salariat et donc à l'autonomie économique est une grande conquête de la fin du XXe siècle. Aujourd'hui, elles représentent 46 % de la population active, elles étaient 34 % en 1960. L'essentiel de la croissance de l'activité économique depuis cinquante ans en France est dû aux femmes. En 1962, on comptait 6,7 millions de femmes actives pour 12,1 millions aujourd'hui. Dans la même période, les hommes sont passés de 12, 6 millions d'actifs à 14,2 millions.

Second changement : la scolarisation massive des filles depuis les années 1970. A partir de cette date, elles ont rattrapé et dépassé les garçons en termes de réussite scolaire et universitaire. Elles sont plus nombreuses à être bachelières et diplômées de l'université que les jeunes gens. Malgré tout, des inégalités persistent et même se reconstruisent entre hommes et femmes sur le marché du travail. Ces inégalités se lisent en matière de salaires : entre 15 et 25 % de moins pour les femmes (selon les secteurs et la manière de compter). En termes d'accès aux responsabilités, comme l'explique Jacqueline Laufer, le fameux « plafond de verre » existe toujours. Même si le nombre de femmes cadres a beaucoup augmenté, il n'est pas proportionnel à la valeur des diplômes obtenus par les filles. Enfin, le surchômage féminin continue à se manifester : chez les moins de 25 ans par exemple, les chiffres montrent que l'accès au premier emploi est plus difficile pour elles. Les femmes mettent aussi beaucoup plus de temps que les hommes à retrouver un emploi après un licenciement.