Qu'est-ce qu'un stéréotype ?
Le stéréotype désigne, en termes d'imprimerie, l'image qui à partir d'un ensemble de caractères fixe permet de répéter l'impression. Le journaliste Walter Lippman a, le premier, dans son livre Public Opinion (1922), appliqué ce terme aux « images dans la tête » que nous avons d'autres groupes. En termes modernes, le stéréotype est un ensemble de croyances donnant une image simplifiée des caractéristiques d'un groupe.
Le préjugé inclut le stéréotype, qui en constitue l'aspect cognitif, mais y ajoute « un aspect conatif (la prédisposition à agir d'une certaine façon) » et un aspect affectif, fait de sentiments de méfiance, de mépris... Le préjugé, en effet, est généralement péjoratif.
Quel rôle jouent-ils ?
« Les stéréotypes et les préjugés remplissent une fonction, souligne Charles Stangor 1. Les gens y tiennent parce qu'ils les aident à donner sens au monde qui les entoure, à se sentir bien dans leur peau et à être acceptés par les autres. » En effet, définir un groupe par un petit nombre de traits nous permet de savoir rapidement à quoi nous attendre : les femmes sont coquettes, les Allemands sont sérieux... Cette simplification nous fait gagner du temps : dans une ville inconnue, je demanderai mon chemin à un chauffeur de taxi ou à un policier, parce que je les mets dans la catégorie « connaissent leur ville ».
Cela, c'est l'aspect cognitif. L'aspect social est important : les stéréotypes caractérisent le groupe des « autres » - l'exogroupe - par rapport à « notre » groupe, ou endogroupe ; si nous nous situons comme Français, les autres, ce sont les étrangers ; comme hommes, ce sont les femmes, etc. Les traits que nous attribuons à ces autres nous servent à renforcer notre identité sociale, en « nous » valorisant par rapport à « eux ». Ce besoin de valoriser, et de favoriser, son camp apparaît même lorsque les groupes sont constitués sur une base artificielle - ce que Henri Tajfel a appelé des « groupes minimaux »2. Exemple : on divise des gens en deux groupes, sur la base d'une prétendue préférence pour un de ces deux peintres, Klee ou Kandinski (en fait au hasard), puis on leur donne à répartir de l'argent entre deux personnes : chacun favorise celui qui appartient à son propre groupe. A partir de ce type d'expériences, H. Tajfel a élaboré une « théorie de l'identité sociale », en vertu de laquelle « les individus s'efforcent d'élaborer une identité sociale positive [...] qui résulte en bonne part des comparaisons favorables qui peuvent être faites entre l'endogroupe et quelques exogroupes pertinents »3.