Margot Giacinti : dans les archives du féminicide

Comment ces meurtres ont-ils été perçus et traités dans l’histoire ? Dans sa thèse, la politiste lève le voile sur un phénomène longtemps occulté.

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Quand vous avez commencé votre thèse en 2017, le concept de « féminicide » était très peu utilisé en France. Comment avez-vous rencontré votre sujet ?

En Erasmus en Norvège, en 2014, j’ai suivi des cours de criminologie du genre : il s’agissait d’étudier des faits sociaux comme le viol ou les meurtres de femmes au prisme de la sociologie du droit. Dans le cadre de ce cours, au détour d’un texte, j’ai découvert ce terme, « féminicide », qui désigne le meurtre d’une femme parce qu’elle est une femme. Peu importe qui commet le crime, même s’il s’agit principalement d’hommes. L’important est que le meurtre se produise du fait de la position sociale vulnérable des femmes dans la société.

Comment avez-vous travaillé ?

À partir des archives judiciaires départementales du Rhône, j’ai délimité un corpus de 450 cas de procès pour meurtres de femmes, étendus sur une période qui court de 1791 à 1976. Environ 380 correspondent effectivement à des féminicides, qui ont majoritairement lieu dans le cadre d’un mariage ou d’une relation amoureuse. On retrouve également des féminicides motivés par le viol, mais aussi ce qu’on appelle des « féminicides crapuleux » : des femmes, ciblées parce qu’âgées, seules et vulnérables, sont tuées afin d’être volées.

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Je me suis également plongée dans des archives de journaux et de débats parlementaires. J’ai cherché à confronter l’histoire des idées (comment nommait-on les féminicides avant que ce terme existe ?) aux faits empiriques (quel traitement judiciaire réservait-on aux meurtriers ?).