Pères

La fin des patriarches ?

Pendant longtemps, il y eut Dieu-le-Père, qui régnait sur la communauté humaine, son sbire pour le représenter auprès du peuple, le roi, et tous les autres pères qui, à l'image de ces deux-là, régnaient eux sur l'espace familial. Même si le Code civil de Napoléon (1804) avait tenté de réaffirmer la toute-puissance du pater familias (il pouvait par exemple demander l'emprisonnement d'un fils jugé indigne), selon beaucoup d'historiens et de sociologues de la famille, c'était trop tard : la Révolution avait mis le ver dans le fruit, d'une part en guillotinant le roi, d'autre part en enlevant aux pères certaines prérogatives, comme celle de déshériter ses enfants. Le système patriarcal s'est pourtant assez bien porté pendant encore cent cinquante ans. Dans la société, l'« autorité institutionnalisée des hommes » (selon l'expression du sociologue Manuel Castells) et les modèles hiérarchiques régnaient en maîtres. Dans la famille, les pères détenaient le contrôle et l'autorité... D'autant que les modèles psychologiques légitimaient ces configurations : le psychanalyste Jacques Lacan par exemple, avec sa théorie du « nom-du-père », posait le père comme le représentant de la Loi, renforçant ainsi la dualité des rôles parentaux, la mère comme source affective et le père comme représentant de l'autorité.