Le camion rouge, la grande échelle, le casque, la veste en cuir, le « pin-pon », le combat contre les flammes... : les pompiers ont fait rêver des générations d'enfants. Mais leur popularité déborde le cadre des cours de récréation : 96 % des Français ont d'eux une opinion favorable. Cette gloire va-t-elle résister aux transformations de leurs fonctions sociales ? En quoi consiste leur travail ? Les sociologues Dominique Boullier et Stéphane Chevrier ont suivi quotidiennement, pendant deux ans, des sapeurs-pompiers (à Paris, en Ille-et-Vilaine et dans le Lot) 1. Ils dressent un portrait précis et vivant de ces héros qui s'avouent, parfois, fatigués.
La figure du pompier est spontanément associée à un ensemble de qualités : le dévouement, le courage, alliés à une grande efficacité. Elle s'enracine aussi dans une imagerie : le camion, les flammes, etc. Pour les auteurs, les pompiers contribuent amplement à entretenir cette légende. Evoluant dans des espaces publics et donc sous le regard des gens, ils doivent veiller à se mettre en scène. Sur le lieu d'un sinistre, ils font en sorte de donner l'impression de la maîtrise des événements et de l'hyper-organisation. D'où également le soin apporté aux tenues et aux véhicules (on ne verra jamais un camion de pompiers cabossé ou rouillé).
Soldat, expert ou secouriste ?
Au coeur de l'identité professionnelle des pompiers se trouve le feu, l'intervention à la fois la plus crainte et la plus prisée. « Je crois qu'il faut aimer le feu pour être pompier... Le feu c'est le truc, c'est le grand truc, c'est le truc vicieux, c'est le truc qu'on veut avoir », déclare un sergent. Le feu de forêt est décrit sur le registre de la guerre et du corps à corps. L'incendie est aussi le territoire des pompiers : ils dirigent les opérations et sont maîtres à bord. Pour les accidents de la route, les secours aux personnes, domaines importants de leur activité, ils doivent composer avec d'autres acteurs : police, médecins, travailleurs sociaux...