Quelle crise de la biodiversité ?

Érosion de la biodiversité. Enjeux et débats, Christian Lévêque, ISTE Éditions, 2022, 272 p., 54 €.

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De nos jours, impossible d’échapper aux annonces catastrophiques sur la diversité du vivant. Mais pour l’écologue Christian Lévêque, ces discours très médiatisés donnent une vision faussée de la situation globale. Il reconnaît que certaines espèces se trouvent dans des situations critiques. Pour autant, parler d’extinction globale est, selon lui, pour le moins exagéré. Il faut déjà comprendre que la notion de biodiversité est peu claire parce qu’elle recouvre plusieurs choses distinctes : la diversité des espèces, la diversité génétique et la diversité des écosystèmes. En outre, la moyenne de ces diversités au niveau mondial cache de très grandes disparités régionales. Par exemple si, sur certaines îles, de nombreuses espèces ont disparu ces derniers siècles, très peu se sont éteintes sur les continents. Puis, même sur ces îles, la biodiversité n’a pas toujours diminué car d’autres espèces s’y sont installées. Les discours alarmistes ont aussi tendance à noircir le tableau en se focalisant sur les extinctions sans parler des spéciations. Or ces dernières sont beaucoup plus fréquentes qu’on l’imagine, tant une forme de fixisme imprègne encore beaucoup d’esprits. À ce sujet, justement, il ne faut pas oublier que la biodiversité n’a cessé de croître depuis des millions d’années et qu’après chaque extinction massive, elle est repartie de plus belle. De même, selon C. Lévêque, ces discours exagèrent le rôle des espèces dans la viabilité des écosystèmes. Par exemple, à ce jour, le fait que les humains aient fait disparaître des espèces de certains territoires n’a jamais entraîné l’effondrement de la biodiversité de ces derniers. La résilience des écosystèmes ne doit pas être sous-estimée. Bien sûr, personne ne peut nier que l’expansion de la civilisation humaine a entraîné une diminution, parfois drastique, de certaines populations animales. Mais qui voudrait sérieusement que les lions maraudent librement dans le sud de l’Europe comme jadis ? C. Lévêque nous invite donc à dépasser les postures militantes pour poser un regard plus informé sur la diversité du monde vivant et pour cesser de considérer que toute action humaine est néfaste pour la nature. Après tout, les humains font aussi partie de la nature…