S'attacher : un besoin vital

Dès ses premières secondes de vie, le bébé est voué à créer des liens avec les personnes qui l’entourent. Au-delà d’une réelle valeur affective, cet attachement répond avant tout à un besoin vital, assurant sa sécurité et sa survie dans notre monde.

Mathéo, 6 mois, est allongé sur son tapis d’éveil. Sa maman feuillette un magazine à ses côtés, lui adressant de temps en temps quelques mots doux ainsi que des petites caresses sur les pieds. Mathéo, serein, manipule son éléphant rose tout en jetant régulièrement quelques regards en direction de sa mère. Mais soudain, celle-ci se lève et quitte précipitamment la pièce car on a frappé à la porte. Mathéo se met alors à pleurer, puis à crier. En l’espace de quelques secondes, le petit garçon est passé d’un état de sérénité à une position d’alerte. Le départ instantané de sa mère a plongé l’enfant dans une situation d’insécurité, de détresse, entraînant l’activation de ses signaux d’alerte. Cette scène, que tous les parents connaissent, est la manifestation visible du lien d’attachement qui relie un tout-petit à son entourage.

Depuis John Bowlby, psychiatre et psychanalyste anglais qui élabora sa théorie, les psychologues de l’attachement avancent que, par sa dépendance, tant psychologique que physiologique, un jeune enfant demeure tributaire des adultes pour survivre dans notre monde. C’est naturellement que ce petit être social est destiné à s’attacher aux autres, quelles que soient leurs réponses à ses sollicitations. Pour y parvenir, la nature a doté le bébé d’une palette de comportements lui permettant, dès sa naissance, d’attirer l’attention de l’adulte et de s’assurer de sa proximité. Non pourvu de langage verbal, c’est par le biais des pleurs et des cris que le très jeune enfant exprime son malaise, son inconfort, voire sa détresse et encourage l’adulte à se rapprocher rapidement pour les interrompre. De même, l’apparition de sourires et de vocalises permet au petit humain de créer et de prolonger des échanges avec ses aînés. Tout un ensemble de comportements établit une proximité vitale entre l’enfant et ses protecteurs : « Il peut crapahuter et suivre sa mère en permanence comme un petit poussin suit sa mère poule : c’est la fameuse période entre 10 mois et 2 ans du “bébé koala” ou “bébé timbre-poste” », explique Nicole Guedeney.

Certains malaises occasionnent des réactions en chaîne dans la tête d’un tout-petit. Par exemple, une situation d’alerte, la faim, la fatigue, le froid ou encore la séparation soudaine d’avec les adultes protecteurs entraînent l’émergence d’émotions négatives. Ces frustrations vont, à leur tour, activer son système d’attachement, réaction consistant à se rapprocher de son parent s’il est en âge de se déplacer, ou bien de pleurer, de crier, s’il ne l’est pas. Dès 9 mois, d’autres situations anxiogènes émergent au fil de son développement psychologique : l’éloignement des parents ou de la nourrice le soir, la présence d’un inconnu, l’obscurité de la chambre à coucher ou encore l’irruption d’un chien envahissant dans le salon.