Du jihadiste Flavien Moreau converti à l’islam à sa majorité à l’écrivain Emmanuel Carrère racontant son cheminement vers le christianisme, certains individus choisissent leurs croyances et décident de s’engager volontairement dans une institution religieuse. L’ampleur réelle du phénomène est délicate à cerner. Seule l’Église catholique donne des chiffres chaque année (4 251 adultes ont été baptisés à Pâques en 2019) et l’on bruisse de rumeurs et fantasmes à propos des conversions à l’islam ou au protestantisme évangélique sans avoir aucune évaluation solide.
Les raisons d’un engagement
Ces conversions intriguent : à l’heure où les religions occidentales sont marquées par une individualisation des trajectoires et un accroissement du choix religieux, pourquoi s’engager auprès d’une institution religieuse ? Les raisons sont intimes, variées et difficiles à catégoriser. Ce peut être en fonction d’un héritage, en général familial, la « religion des grands-parents », qu’on s’empresse de fuir en choisissant une autre religion ou qu’on rejoint parce qu’elle n’a pas été transmise. Par exemple, la majorité des conversions au judaïsme vient d’enfants de père juif élevés en fonction d’un judaïsme « culturel » et qui veulent se faire reconnaître comme membres du peuple juif (c’est la mère qui dans le judaïsme transmet l’appartenance religieuse). De même, dans l’islam ou le catholicisme, on trouve nombre de convertis réaffiliés, qui décident de s’engager dans une pratique religieuse complètement délaissée depuis une génération au profit d’un islam ou d’un catholicisme « culturel ». Une autre partie des conversions d’aujourd’hui transite par l’attrait pour la mystique et ses expériences intimes, notamment l’islam soufi ou le judaïsme de la Kabbale. Il existe aussi des conversions de proximité sociale, par exemple pour les individus se convertissant à l’islam au contact d’une population musulmane immigrée, et dont le choix est porté par les valeurs positives que la religion suppose dans un tel contexte : proximité entre les croyants, entraide, fêtes et partage, etc. Enfin, une part importante des conversions religieuses sont des « conversions matrimoniales » : on change de religion pour se mettre en couple ou épouser un homme ou une femme dont les règles religieuses de la vie maritale et du mariage imposent la même religion. Ces conversions sont des « poisons » pour les clercs, qui refusent généralement de convertir un individu qui présente de façon inspirée l’étendue de l’amour qu’il accorde à son conjoint plutôt qu’à Dieu… « Quand je vois un jeune couple mixte qui vient me voir et me dit que l’un d’entre eux veut se convertir pour se marier, je leur dis “Pacsez-vous, c’est beaucoup plus rapide” », racontait le rabbin Charles Bismuth, chargé des conversions au consistoire israélite de Marseille.