Sélection sexuelle et civilisation

« Tout dans la nature est le résultat de lois immuables », écrit Darwin. C’est aussi à l’une d’entre elles que l’homme doit ses qualités les plus nobles.

Lorsque, douze ans après le succès de L’Origine des espèces, Charles Darwin publie un gros traité de plus de six cents pages intitulé La Filiation de l’homme, il s’acquitte d’une obligation qu’il a longtemps repoussée : on ne déclare pas impunément que l’homme descend du singe. Encore faut-il montrer en quoi les lois naturelles de l’évolution s’appliquent non seulement à sa physiologie, mais aussi à ses comportements. Or, l’homme est « civilisé » : non seulement il n’agit pas exclusivement de manière égoïste, mais il est « cultivé », c’est-à-dire qu’il porte des jugements moraux, sociaux, esthétiques, et enfin exerce toutes sortes d’activités dont le moins que l’on puisse dire est que l’on ne voit pas bien en quoi elles contribuent à rendre les individus plus ou moins aptes à survivre.

 

De l’animal à l’homme

Combien de fois n’avait-t-on pas dénoncé, chez Darwin, les conséquences désastreuses de sa théorie pour les sociétés humaines, réduites à n’être, comme l’écrivait Samuel Butler, qu’un chaos d’individus en lutte les uns contre les autres ? Ou bien la sélection naturelle serait-elle le lot de toutes les espèces vivantes sauf une : l’homme ?

La réponse que donne Darwin à ses détracteurs peut se résumer en trois points :

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1) Non, l’homme n’échappe pas aux lois naturelles de l’évolution : beaucoup de ses comportements, même les plus conscients, ont leur source dans des instincts présents chez les animaux.