Une mondialisation en l'an mil

L’An 1000. Quand les explorateurs ont connecté l’humanité et que la mondialisation est née, Valerie Hansen, Quanto, 2021, 396 p., 24,50 €.

Pour la première fois dans l’histoire, des échanges eurent lieu entre l’Ancien et le Nouveau Monde. Selon Valerie Hansen, cette liaison transocéanique est le maillon crucial d’une mondialisation commerciale alors en cours, et qui en annonce bien d’autres.

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La mondialisation a-t-elle commencé sous les pas d’un criminel ? Peu avant l’an mil, le Norvégien Erik le Rouge, exilé pour meurtre, refit sa vie en Islande. De là, à nouveau frappé d’exil après avoir perpétré un second homicide, il navigua vers l’ouest avec ses gens, établissant une colonie dans le sud du Groenland, ou « verte terre ». Il aurait baptisé ainsi ce nouveau monde afin de convaincre ses compatriotes de venir s’y établir. Vers l’an mil, ses fils mirent le cap encore plus à l’ouest, et débarquèrent en Amérique du Nord. À en croire les sagas, ils y prélevèrent un peu de bois, car celui-ci manquait au Groenland et en Islande, chassant probablement des morses pour revendre leur ivoire en Europe, voire au Moyen-Orient, échangeant tantôt des textiles, tantôt des horions, avec les indigènes quand ils les rencontraient.

À ce récit, l’historienne Valerie Hansen ajoute un tour du monde des échanges commerciaux de l’époque, marquant, selon elle, les premiers pas d’une mondialisation à venir. Elle en veut pour preuve qu’à partir de l’an mil, pour la première fois dans l’histoire, un objet aurait pu faire le tour du monde, de main en main. On se prend à imaginer cet objet fabriqué en Chine, empruntant, d’achat en échange, les routes maritimes connectant Canton à l’Inde, acheminé comme cadeau jusqu’à Bagdad, ressurgissant entre les mains d’un Viking à Constantinople, et de là partant vers le nord, obliquant à l’ouest, transitant par l’Islande, troqué contre de l’ivoire de morse au Groenland, traversant l’actuel Canada et revenant en Asie par le biais des populations proto-inuits présentes des deux côtés du détroit de Béring.