Vierges triomphantes et onanistes asexuels

La chasteté des jeunes et l’abstinence des adultes sont les idéaux promus par des mouvements religieux et hygiénistes. Mais abolir toute activité sexuelle n’est pas un objectif très justifiable.

Sur des modes et pour des motifs différents, les doctrines incitant à la chasteté ont gagné en visibilité au cours de la décennie 1990. Encore faut-il savoir ce que l’on entend par là. Les positions de l’Église catholique sur le célibat religieux, l’avortement et la contraception appartiennent à une tradition séculaire, et semblent n’avoir pas d’autre ambition que de limiter l’activité sexuelle des clercs et des couples, sans toutefois l’abolir. Pour le clergé, et pour tous les célibataires, la chasteté est un idéal sans cesse réaffirmé par le Vatican, mais une règle de moins en moins suivie.

Le fondamentalisme protestant a d’autres soucis : préserver la virginité des jeunes gens et lutter contre la fornication hors mariage. Aux États-Unis, divers mouvements incitant les jeunes à la chasteté ont connu un renouveau dans les années 1990. True Love Waits, par exemple, encourage les adolescents à signer une « promesse de chasteté » jusqu’au mariage : en 1996, le mouvement se félicitait d’avoir obtenu 350 000 signatures, et s’est étendu depuis au Canada et à l’Afrique du Sud. Bavam (Born Again Virgins of America) s’adresse à des jeunes filles « repentantes » qui, sans motif religieux, professent l’abstinence sexuelle en amour, non sans un certain féminisme. La mode du célibat et de l’inactivité sexuelle a été également relayée par des chanteurs, des acteurs et des sportifs célèbres, travaillant à promouvoir une culture « jeune et chaste », pour des motifs aussi bien pratiques que moraux.