Abraham Maslow De quoi avons-nous vraiment besoin ?

Psychologue renommé pour sa pyramide des besoins, référence incontournable en développement personnel, Abraham Maslow est l’un des fondateurs de la psychologie humaniste.

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La crise sanitaire que nous vivons aura-t-elle sonné le retour aux fondamentaux de la pyramide des besoins ? Depuis un an, la santé est redevenue la priorité pour tous, quoi qu’il en coûte. Nous avons découvert l’existence de commerces « essentiels » et d’autres « non essentiels ». Les différentes périodes de confinement nous ont rapprochés les uns des autres. Nous nous sommes inquiétés pour nos proches, nos amis. Nous avons redécouvert des plaisirs simples (un bon repas, un chez-soi cosy, une promenade à l’air libre…). Les loisirs, les sorties, les voyages sont devenus des préoccupations lointaines destinées au monde d’après. Ce retour aux sources signe-t-il la « réhabilitation de la pyramide de Maslow », comme le laisse entendre Philippe Mouillot, maître de conférences en sciences de gestion sur le site The conversation 1 ? Ou serait-ce seulement une petite parenthèse, dans une société qui tend à créer toujours plus de nouveaux besoins de consommation ?

Selon Abraham Maslow, les besoins se déclinent par paliers successifs (encadré ci-dessus). À la base de sa célèbre pyramide se trouvent les besoins d’ordre physiologique (manger, boire, dormir…) et sécuritaire (protection, santé, revenus…). Tant que ces besoins élémentaires ne sont pas assurés, la personne ne peut se consacrer, selon lui, à ce qu’il appelle « la réalisation de soi » (self actualization). Mais une fois ces besoins satisfaits, la personne tendrait vers des préoccupations plus « nobles ». « On ne comprendra jamais la vie de l’homme si l’on ne prend pas en compte ses aspirations les plus hautes 2 », écrit A. Maslow. L’accomplissement de soi, la quête d’identité, les efforts pour progresser vers la santé, vers plus d’autonomie, vers l’excellence sont des tendances universelles qu’on retrouve chez tous les êtres humains, estime-t-il. « Maslow a été le premier à évoquer la notion de besoins psychologiques tels que le besoin d’amour, d’estime ou d’accomplissement. C’est une figure incontournable. Ses notions sont encore utilisées dans nombre de théories motivationnelles aujourd’hui », estime Fabien Fenouillet, professeur de psychologie cognitive et spécialiste des questions de motivation. « C’était un pionnier, un visionnaire…, l’un de ceux qui ont majoritairement contribué à notre vision moderne de la nature humaine », considère le psychologue Robert Frager dans la préface du livre phare de Maslow Devenir le meilleur de soi-même. Un psychologue influent donc, mais aussi contesté de son temps par ses confrères, notamment en raison de sa démarche essentiellement empirique.

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Des individus au-dessus de la mêlée et résistants aux chocs

Pour élaborer sa théorie, A. Maslow se sert d’une méthode plutôt singulière. Il observe, tout d’abord dans son entourage, les traits de caractère de ses mentors, à qui il voue une certaine admiration. Il complète ces données par des biographies d’hommes politiques, philosophes, scientifiques ou écrivains célèbres, telles qu’Einstein, Roosevelt, Lincoln, Huxley ou Spinoza, des personnages qu’il juge exemplaires. A. Maslow retient de ces observations un ensemble de points communs à tous ceux qu’il admire, célèbres ou anonymes. En voici quelques-uns, qu’il cite dans son livre : ils ont une aptitude à « détecter le simulé, le faux et le malhonnête », à « juger les gens correctement et avec efficacité ». Ils s’acceptent tels qu’ils sont avec leurs défauts et sans culpabilité, honte ou anxiété. Ils sont spontanés, simples, naturels, centrés sur les problèmes extérieurs et non sur leur propre personne. Ils supportent la solitude sans trop de difficultés, l’apprécient même. Ils se soucient peu de ce que les autres peuvent penser d’eux. « Ils ont souvent la faculté de se tenir au-dessus de la mêlée, de demeurer intacts, imperméables à ce qui met les autres en émoi », écrit-il. Ils sont autonomes, ne dépendent ni du monde extérieur, ni des autres, ni de la culture. « Cette indépendance par rapport à l’environnement crée une stabilité relative face aux traumatismes, aux chocs, aux privations, aux frustrations et autres difficultés de l’existence », affirme-t-il. Ils sont humbles, empathiques et respectueux des autres, et ce quels que soient leur origine, leur religion ou leur statut social. Ils ont un cercle d’amis restreint, mais entretiennent des relations authentiques et profondes avec eux. Dotés d’un fin sens de l’humour, ils sont capables de rire d’eux-mêmes. Enfin, ils ont su développer, chacun dans sa matière de prédilection, leur créativité.