Peut-on réussir ses études lorsqu’on a des parents qui ne sont jamais allés à l’école et qui vivent dans la précarité ? Peut-on devenir un élève brillant en suivant des cours dans une école de campagne aux moyens dérisoires et aux enseignants dépassés ? Albert Bandura vous dira « oui », puisqu’il en est lui-même le meilleur exemple. Ayant grandi dans la précarité, il est devenu professeur à la prestigieuse université de Stanford et est aujourd’hui considéré comme l’un des psychologues les plus influents de notre époque. Qu’est-ce qui a permis à Bandura d’en arriver là ? Avant tout une ambiance familiale propice aux expériences personnelles et justement cette précarité du dispositif scolaire qui encourageait les enfants à se prendre en charge eux-mêmes. Une certaine liberté donc, sous le regard d’adultes bienveillants qui lui aurait permis de forger ce qu’il nommera le sentiment d’efficacité personnelle.
Cultiver son autoefficacité
Le postulat est simple : plus on croit en ses capacités à réussir une tâche, plus on aura de chances d’aller au bout de celle-ci. Quatre facteurs sont susceptibles de renforcer ce sentiment d’efficacité personnelle : les expériences vécues (des réussites le fortifient, des échecs le minent), le modelage social ou apprentissage par imitation (encadré ci-dessous), la persuasion sociale (l’encouragement par les enseignants, les parents, des pairs), l’état physiologique et émotionnel (concentration, vivacité, sérénité…). Pour Bandura, ce sentiment d’autoefficacité est la base de toute réussite, qu’elle soit scolaire, professionnelle, sportive, thérapeutique ou toute autre. À ne pas confondre avec l’estime de soi. Celle-ci est fondée sur la croyance en sa valeur personnelle, alors que le sentiment d’efficacité personnelle fait référence aux aptitudes. On peut être mauvais élève et avoir une très bonne estime de soi. Tout comme on peut avoir un bon sentiment d’efficacité scolaire et une piètre image de sa valeur personnelle. Sa théorie, Bandura tente de l’appliquer aux psychothérapies en travaillant notamment sur les phobies. Il propose à ses patients des exercices de maîtrise dirigée pour apprivoiser leurs phobies. Il en est convaincu, c’est en maîtrisant petit à petit des situations phobiques qu’on acquiert la conviction de pouvoir dépasser ses peurs et qu’on renforce son pouvoir d’agir.