Besoin d'un « psy »

Dans de nombreuses situations, l'individu recherche une aide chez les professionnels de la psychothérapie. Mais comment s'engager dans une telle démarche, et définir ce qu'est un bon thérapeute ?

Que peut-on attendre d'une psychothérapie ? Le lecteur avisé, sachant qu'il existe aujourd'hui pléthore de psychothérapies (certains recensements en dénombrent plus de 200 !), risque d'emblée de demander : mais de quelle psychothérapie parlez-vous ? Et plus directement encore : quel crédit scientifique faut-il apporter à une telle démarche, dont la diversité des formes ne peut susciter que scepticisme, voire suspicion ? Commençons donc par éclaircir le paysage, pour pouvoir ensuite mieux saisir les conditions nécessaires à la production du fruit inestimable dont la psychothérapie est capable.

En consonance avec la pluralité des pensées et des pratiques sociales qui fragmentent notre société contemporaine (foisonnement et morcellement des groupes ethniques, des disciplines du savoir, des spécialisations professionnelles, des pratiques sexuelles, etc.), le champ de la psychothérapie apparaît lui aussi éclaté. Et ce processus de diversification va s'accélérant car aujourd'hui, plus que jamais, la psychothérapie répond à un double mouvement de société : l'idéal post-moderne et la psychologisation des échanges sociaux.

Depuis les années 60, la remise en question des valeurs ou croyances absolues, définies par une autorité toute-puissante, a produit une conception plus tolérante et ouverte des voies à emprunter pour vivre ensemble. Dans ce contexte, un modèle ou une pratique totalitaire devient théoriquement inconcevable, et la pluralité des modèles en psychothérapie participe d'un idéal postmoderne.

Une seconde raison qui peut expliquer l'importance accordée de nos jours aux soins psychothérapeutiques, sous leurs formes les plus variées, est directement liée aux efforts demandés à l'être humain dans le contexte individualiste de notre culture. En effet, dans une société où le tissu social s'atomise, où les démarches et les références s'individualisent, où l'indépendance se cultive au détriment de l'appartenance, l'être humain se sent plus facilement isolé et sans soutien. En passant d'une société d'obéissance à une société de gouvernement de soi, qui exige de ses citoyens d'être responsables, nous sommes invités à nous prendre en charge, à assumer nos décisions dans les contraintes difficiles de la société postmoderne.

publicité

Par exemple, décider pour une femme d'avoir un enfant en prenant en compte sa carrière professionnelle, le désir de son mari et les pressions éventuelles de ses propres parents, suscite évidemment un surcroît de tension émotionnelle. Ou encore, pour une personne divorcée, faisant valoir son droit au bonheur, gérer une nouvelle vie de famille avec les enfants de son nouveau conjoint, c'est devoir souvent trouver des solutions sans modèle prêt-à-porter. Les pouvoirs publics désignent alors des agents sociaux pour soulager ceux qui, dans cette foule solitaire, ne s'y retrouvent pas. Les « psys », dont les psychothérapeutes bien sûr, figurent parmi ces agents sociaux, appelés à limiter les effets dévastateurs d'un « vide moral » et investis en conséquence du pouvoir de définir les enjeux essentiels de l'existence humaine.

Faut-il conclure pour autant que la psychothérapie se laisserait entièrement définir par des besoins de société ? Si le contexte de production sociale de la psychothérapie ne doit jamais être méconnu - nous en verrons quelques conséquences plus loin -, il n'en reste pas moins que l'objectif nodal de la psychothérapie est le même depuis son origine (fin du xixe siècle) : diminuer, voire supprimer les troubles psychiques dont souffre l'être humain, à l'aide de moyens psychologiques spécifiques. Même s'il existe, on le sait, plusieurs méthodes pour y parvenir, certaines conditions doivent être réunies à chaque fois pour qu'une « bonne » psychothérapie ait lieu. Examinons-les maintenant. Elles devraient nous aider à comprendre ce que l'on peut attendre de la psychothérapie, et même plus concrètement, éclairer une personne dans le choix de son psychothérapeute.

Une méthode rigoureuse, un praticien compétent

La première nécessité est sans doute de pouvoir se trouver en présence d'un psychothérapeute compétent. Tout en s'adressant à la souffrance d'un être humain toujours singulier et unique, la psychothérapie n'en revendique pas moins un statut scientifique. Celui-ci lui est accordé dans la mesure où elle peut se référer à une méthode, dont le but est de définir de manière rigoureuse le trouble psychique, le modèle de personnalité qui le sous-tend, l'effet thérapeutique recherché, ainsi que les moyens pour y parvenir. C'est à la maîtrise de telles méthodes que se forme un psychothérapeute pendant plusieurs années. A l'aide de supervisions et en analysant même ses motivations à devenir psychothérapeute, il devient capable de travailler plus objectivement et plus efficacement avec son patient. En somme, grâce à sa compétence qui résulte à la fois des ressources de sa personnalité, de sa formation scientifique et de son expérience professionnelle, il parvient à rester critique par rapport à ce qui se passe dans le processus thérapeutique.