Publié en 1990, la même année que le premier numéro de Sciences Humaines, le premier rapport d’évaluation du Giec conclut à la réalité du changement climatique et à son origine humaine. Il marque à la fois l’aboutissement d’un processus de construction d’un consensus scientifique autour du changement climatique et le début d’un processus de construction d’un consensus politique.
Les premiers travaux sur le changement climatique datent des années 1950, avec les premières mesures de concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère. La première conférence mondiale sur le climat, en 1979, fait déjà apparaître un important accord sur la réalité du changement climatique et ses causes. Six ans plus tard, en 1985, un atelier de haut niveau rassemble des représentants politiques et scientifiques à l’initiative du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) et de l’Organisation météorologique mondiale (OMM). L’atelier conclut à la forte probabilité d’un changement climatique mais aussi à la nécessité de formaliser le consensus scientifique émergent.
Le PNUE et l’OMM sont initialement pressentis pour assurer cette mission de formalisation mais plusieurs gouvernements, à commencer par les gouvernements britannique et américain de Margaret Thatcher et Ronald Reagan, sont réticents à l’idée de confier cette mission à des experts de l’Onu. C’est ainsi que naît en 1988, à la demande du G7, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (Giec), certains gouvernements ayant davantage confiance dans la neutralité des chercheurs que dans celle des experts de l’Onu, soupçonnés d’être catastrophistes et trop radicaux. Il est placé sous l’égide conjointe du PNUE et de l’OMM.
Une base scientifique pour négocier
Le premier rapport du Giec est donc publié en 1990, deux ans seulement après la naissance de ce groupe. Si ce travail aboutit aussi rapidement, c’est parce qu’il doit fournir la base scientifique de la négociation qui aboutira à la signature de la convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique au sommet de la Terre de Rio en 1992. La plupart des rapports du Giec accompagneront ainsi d’importantes étapes de la coopération internationale sur le climat : le deuxième rapport, publié en 1995, prépare l’adoption du protocole de Kyoto en 1997 ; le troisième, publié en 2001, reconnaît l’importance de l’adaptation comme stratégie de lutte contre le changement climatique ; le quatrième est publié en 2007, avant la Cop15 de Copenhague, qui se solde hélas par un échec, tandis que le dernier en date, le cinquième, est publié en 2014, un an avant l’accord de Paris.