De la charrue à l'ordinateur : les mondes du travail

- Depuis un siècle, le travail a connu de grands bouleversements.

Au début du xxe siècle, 75% de la population française vivait à la campagne ; au rythme des saisons, le travail se déroulait à la ferme avec la charrue et la faux. Et il en était ainsi depuis des siècles (voir ci-dessous).

- Avec la révolution industrielle, nombre de travailleurs avaient quitté les champs pour rejoindre la ville et l'usine.

La seconde révolution industrielle,

celle du moteur à explosion

et de l'électricité, va accélérer la tendance. Le monde ouvrier

se constitue alors : le mineur, le métallo,

le sidérurgiste, puis l'OS deviennent

les figures emblématiques du monde

du travail (voir p. 18).

- Depuis les années 70, le monde industriel est à son tour en déclin relatif.

Désormais, le travail dans le secteur

tertiaire domine largement : 70%

de la population active travaille

dans des bureaux, administrations,

hôpitaux, écoles, commerces. Les employés, cadres, infirmières, enseignants représentent désormais les deux tiers de la population active (voir p. 18).

- Le statut du travail a beaucoup

changé (voir p. 19). La technique,

le machinisme, l'organisation du travail

ont augmenté la productivité.

Aujourd'hui, un travailleur produit

trente fois le volume d'un paysan

du début du xxe siècle. Tandis que les revenus ont progressé, le temps de travail a beaucoup diminué. De leur côté, les femmes sont entrées massivement sur le marché du travail.

- Le cas français est représentatif de l'évolution de la plupart des pays industrialisés. Bien sûr, chaque pays possède ses spécificités et la place respective de l'agriculture, du travail féminin, du syndicalisme ou du taux de chômage varie plus ou moins d'un pays à l'autre. Mais sur le long terme, les grandes tendances d'évolution sont convergentes. Elles se résument, dans les pays industrialisés, à quelques grands bouleversements, où travail des paysans, des ouvriers, puis travail partiel se succèdent et se superposent.

Dans les pays du tiers-monde, que l'on prenne la Chine, l'Inde ou le Nigeria, la logique est la même. Car l'histoire s'est faite en raccourcit, et l'on y voit coexister le monde hypertechnicisé et l'esclavage des enfants.

Le travail aux champs

- Pendant des siècles, le quotidien des hommes et des femmes a été le travail aux champs : défricher, labourer, planter, récolter, s'occuper des bêtes, couper du bois, chercher l'eau au puits... et recommencer. Un travail épuisant, soumis aux caprices de la nature. Les corps sont vite usés. La division du travail entre hommes et femmes n'empêche pas que tous vivent au contact les uns des autres dans des fermes qui sont aussi leurs lieux d'habitation. Les enfants sont là pour aider : garder les bêtes, les traire, participer aux récoltes.

- Avec la mécanisation du travail agricole - l'arrivée des tracteurs, des moissonneuses, des engrais -, le travail paysan est bouleversé. La petite exploitation familiale décline de façon irréversible face aux grandes exploitations. L'histoire de l'agriculture au xxe siècle semble se réduire à celle de la « fin des paysans » décrite par Henri Mendras. La « civilisation paysanne » a disparu ; pas l'agriculture, qui s'est industrialisée. Le paysan est devenu agriculteur ; à la fois producteur et gestionnaire. Avec lui, la nature a changé de visage. Les champs de blé ou de maïs occupent d'immenses espaces uniformes ; les volailles sont entassées dans de gigantesques enclos.

- A la campagne, le travail ne concernait pas que les paysans. A leur côté, d'autres travailleurs étaient là : ils furent longtemps les artisans forgerons, meuniers, maréchaux-ferrants, et mille autres métiers. C'est encore aujourd'hui le travail des saisonniers. Venus d'autres régions, d'autres pays, ils arrivent pour la récolte des fruits, des légumes, et repartent ensuite sur d'autres terres.

- Ce monde paysan est, dans les pays industrialisés, en voie de disparition. Mais il ne faut pas oublier qu'à l'échelle de la planète, une grande partie de la population vit encore à la campagne : en Asie, en Afrique, en Amérique latine. Ce monde rural connaît en accéléré ce qu'ont connu les pays industrialisés.

Le monde ouvrier

- Le monde ouvrier n'est pas né avec l'usine. N'oublions pas que les maçons, charpentiers, boulangers, éboueurs, pêcheurs, cuisiniers sont des ouvriers. Leur histoire remonte bien avant la révolution industrielle, au temps des corporations et des compagnons. Aujourd'hui encore, les ouvriers forment une constellation très diverse : de l'électricien à l'agent d'entretien, du plombier au mécanicien automobile, du soudeur au peintre en bâtiment, une grande partie ne travaillent pas en usine.