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L'art du coaching de Socrate à aujourd'hui

Les Grands Dossiers des sciences humaines N°73 - L'art du coaching

©Jayk7/Getty

  • Publié le 05 décembre 2023
  • contenu 33 articles

Pratique visant à guider les individus, le coaching s’inspire tant des philosophes antiques que contemporains, il se nourrit également des spiritualités et religions en tout genre, il se développe enfin dans le sillage de la psychologie humaniste et positive. Aujourd’hui, le coaching étend son influence à toutes les sphères de la vie quotidienne : dans le travail, comme dans la sphère privé. Pour ses détracteurs, le coaching représente une marchandisation de nos émotions et de notre bien-être, entre pratique personnelle et métier à proprement parler, le coaching est une discipline en effervescence dont les cadres précis restent à définir.

Les Grands Dossiers des sciences humaines N°73 - L'art du coaching

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dossier issu du magazine
Grands Dossiers n°73

Grands Dossiers n°73
décembre 2023-janvier-février 2024

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Pour approfondir le sujet

PHILOSOPHES D'HIER

Le Souci de soi, Michel Foucault (1984)
Dans le troisième tome de son Histoire de la sexualité, le philosophe français Michel Foucault (1926-1984) analyse la pratique sociale du « souci de soi » dans l’Antiquité grecque. Il montre comment le pouvoir politique valorise des « techniques d’existence », qui appréhendent le soi comme une matière en élaboration permanente. L’apparition du christianisme condamnera la liberté qui en découle – autorisant des pratiques sexuelles et une jouissance de soi – en vertu d’une morale normative à vocation universelle.

Exercices spirituels et philosophie antique, Pierre Hadot (1981)
En interrogeant les liens entre philosophie et religion, l’historien, philosophe et philologue français Pierre Hadot (1922-2010) affirme que la philosophie grecque était avant tout une « manière de vivre » et avait une dimension pratique. Devenir l’élève d’un philosophe revenait à adopter un mode de vie nourri « d’exercices spirituels » comme la méditation, la modération de nos désirs, l’anticipation d’un malheur pour mieux l’accepter, etc.

Les Entretiens, Confucius (6e-5e s. av. J.C.)
Un des ouvrages les plus célèbres de la philosophie chinoise s’organise autour des rencontres de Maître Kong (551-479 av. J.C.), dit Confucius, avec ses différents disciples. Il en ressort une pensée morale et politique qui présuppose la perfectibilité de chacun. Tout individu peut s’efforcer de développer sa principale faculté naturelle, celle de faire preuve d’humanité (ren), c’est-à-dire du bien qu’une personne peut faire à une autre.

La Confiance en soi et autres essais, Ralph Waldo Emerson (19e s.)
Clé de l’anticonformisme prôné par Ralph Waldo Emerson (1803-1882), l’autonomie, ou le fait de compter sur soi (« self-reliance »), génère une solide confiance en ses propres moyens. Elle nous débarrasse de la peur d’être soi et nous conduit à nous affirmer en tant qu’individus propres. Dans cette anthologie, celui qui est considéré comme le premier philosophe américain défend des positions politiques réfractaires à tout conditionnement social et plaide pour un rapport authentique à la nature.

…ET D'AUJOURD'HUI

Ubuntu, je suis car tu es. Leçons de sagesse africaine, Mungi Ngomane (HarperCollins, 2019)
Petite-fille de l’archevêque et défenseur des droits humains sud-africain, Desmond Tutu, Mungi Ngomane explique la philosophie attachée au terme bantou « ubuntu », ou « humanité ». C’est en appliquant quatorze leçons que ce concept peut devenir effectif dans notre vie quotidienne. L’empathie, la bienveillance, l’ouverture d’esprit, le respect et le rire sont ici les moyens dont on dispose pour nouer des rapports sains avec autrui.

Le Sens dans la vie, Susanne Wolf (Eliott, 2023)
Nous n’avons pas besoin de nous appuyer sur une morale prescriptive pour identifier ce qui peut donner du sens à nos vies, soutient Susan Wolf. Condition essentielle à une vie bonne et heureuse, le sens émerge de deux conditions : le fait qu’une activité nous plaise tout en étant objectivement attrayante. Dans les conférences et discussions philosophiques qui composent cet ouvrage de 2010, cette philosophe américaine s’efforce de trouver un équilibre entre ces deux conditions parfois divergentes.

Qu’est-ce qu’une vie bonne ?, Judith Butler (Payot, 2014)
La conférence prononcée par Judith Butler, lorsqu’elle reçoit le prix Théodor-Adorno en 2012, questionne une phrase de ce dernier : « On ne peut mener une vie bonne dans une vie mauvaise. » La philosophe américaine souligne l’importance des conditions d’existence pour juger de la valeur accordée à la vie d’un individu. Les inégalités actuelles, conséquences de discriminations multiples, invitent à repenser la manière dont la tradition philosophique s’est saisie du fait social qu’est la vie bonne.

Ces expériences qui nous transforment, Laurie Ann Paul (Eliott, 2023)
Selon la philosophe américaine Laurie Ann Paul, il existe des expériences singulières, et si radicalement transformatrices, qui nous mettent dans la situation de faire des choix de vie sans savoir ce qui en découlera. Ces expériences déjouent notre capacité à décider de manière rationnelle ce qu’il serait préférable de faire. Dès lors, vivre sa vie implique un défi, ou un saut dans l’inconnu, à la découverte d’un nouveau moi.

PSYCHOLOGIE

Devenir le meilleur de soi-même, Abraham Maslow (1954)
Initiateur de la psychologie humaniste et précurseur du management positif, Abraham Maslow (1908-1970) s’intéresse à la motivation et à la personnalité des individus, titre sous lequel paraît cet ouvrage pour la première fois en 1954 (Motivation and Personality). Partant du postulat que l’être humain est bon par essence, le psychologue américain en déduit un penchant naturellement tourné vers le progrès et l’excellence. A. Maslow crée alors une pyramide représentant nos besoins, allant des plus primaires aux plus élevés, qui peut être appliquée aussi bien en psychologie que dans un contexte scolaire ou entrepreneurial.

Le Développement de la personne, Carl Rogers (1961)
Dans ce recueil de textes, le psychologue humaniste américain Carl Rogers (1902-1987) présente la vision d’un thérapeute sur le processus complexe par lequel on devient une « personne ». Opposé aux théories psychanalytiques freudienne et kleinienne, il s’inscrit dans le pragmatisme du psychologue et philosophe américain John Dewey (1859-1952), qui favorise les effets et les résultats de nos idées. Mêlant éléments biographiques, expériences professionnelles diverses et réflexions intellectuelles, C. Rogers affirme qu’en psychothérapie individuelle, le client découvre, par le biais d’une approche affective de personne à personne, qu’il recèle en lui les ressources nécessaires à son épanouissement.

Analyse transactionnelle et psychothérapie, Éric Berne (1961)
C’est dans cet ouvrage que le psychiatre américain Éric Berne (1910-1970) définit sa méthode de thérapie mondialement connue : l’analyse transactionnelle. Partant de présupposés optimistes sur la nature humaine, É. Berne montre que notre cadre de référence, ou d’appréhension du monde, se décline en trois états (adulte, enfant, parent) et s’articule autour d’un scénario de vie que nous élaborons en grandissant.

Oui à la vie ! Découvrir un sens à l’existence malgré les souffrances, Viktor E. Frankl (L’Homme, 2021)
Créateur de la logothérapie, Viktor E. Frankl (1905-1997) propose de répondre au besoin de signification existentielle qu’éprouve un individu. Le neurologue et psychiatre autrichien, dont la vie vient d’être mise en images dans un roman graphique, explique sa thérapie par son expérience de l’absurdité dans le camp de concentration d’Auschwitz, où il observa les liens entre santé mentale et survie.

Système 1, système 2. Les deux vitesses de la pensée, Daniel Kahneman (2011)
Daniel Kahneman, psychologue et économiste américano-israélien, distingue chez l’être humain un mode de pensée rapide, instinctif et émotionnel (le système 1) d’un mode de pensée lent, réfléchi et rationnel (le système 2). Pour ce professeur de l’université de Princeton, le système 1 génère des biais cognitifs (raisonnements incorrects, erreurs de jugement ou de perception) contraires à la pensée rationnelle.

CRITIQUES

Du bien-être au marché du malaise, Nicolas Marquis (PuF, 2014)
À travers une enquête aux matériaux diversifiés, issue de son doctorat, Nicolas Marquis analyse l’engouement que suscite la lecture de livres de développement personnel auprès d’un échantillon de la population belge francophone. En critiquant ces ouvrages comme étant des instruments de domination, le sociologue analyse les conditions empiriques et les moyens discursifs mis en place pour favoriser leur succès auprès d’un lectorat privilégié.

Pour en finir avec soi-même, Laurent de Sutter (PuF, 2021)
Antimanuel de développement personnel au titre provocateur, l’ouvrage de Laurent de Sutter nous alerte sur le rapport qu’entretiennent la quête de soi et les impératifs socioéconomiques contemporains. Le philosophe belge met notamment en évidence les injonctions sous-jacentes au vernis ontologique et bienveillant du développement personnel.