Entretien avec Jean Guilaine : L'héritage néolithique

Dans son dernier ouvrage, l’archéologue Jean Guilaine explore notre « héritage néolithique ». Et démontre que nombre des traits saillants de notre civilisation moderne étaient en germe il y a quelque dix millénaires : pratiques de sociabilité et de pouvoir, atteintes à l’environnement…

 

À vos yeux, que reste-t-il du Néolithique aujourd’hui ?

Il y a deux aspects dans le legs du Néolithique : matériel et idéel. Au plan matériel, notre alimentation végétale est aujourd’hui fondée sur les trois principales céréales (blé, riz, maïs) issues de la néolithisation, tandis que notre nourriture carnée provient pour beaucoup d’animaux domestiques. Cette « révolution » fut aussi le moment où apparut toute une série d’innovations techniques : systèmes hydrauliques (puits, barrages, irrigation), exploitations minières (silex puis minerais), outils de déforestation, instruments agricoles (araire, fléau, plan­che à dépiquer), attelage, véhicules à roues (chars, chariots), sceaux et premiers indices de comptabilité, etc.
D’autres traits culturels ont carrément conditionné la trajectoire humaine jusqu’à aujourd’hui : la maison pérenne (lieu impliquant une histoire familiale et une généalogie), le village à vocation agricole (la ville introduira ensuite un nouveau seuil dans le regroupement des populations), le territoire exploité pour la production de nourriture et symbole de l’appropriation d’un espace.